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samedi 13 avril 2024

À table avec Jésus

 


Nous sommes dans une série iconographique sur la vie de Jésus adulte. Aujourd’hui, des récits de table (on mange beaucoup dans la Bible).

 

Il y a tout d’abord les Noces de Cana où Jésus change l’eau en vin et d’ailleurs ce serait son premier miracle. Mais je n’ai photographié aucune oeuvre illustrant l’épisode (la peinture la plus célèbre est située en face de la Joconde, bien sûr).

 

Le Repas chez Simon, appelé aussi l’Onction à Béthanie

L'épisode est le suivant : Jésus est invité à la table d’un pharisien Simon. Une femme pécheresse apprend qu’il est présent.

Ayant appris qu’il était à table chez le pharisien, elle avait apporté un vase de parfum. Se plaçant alors en arrière, tout en pleurs, à ses pieds, elle se mit à lui arroser les pieds de ses larmes ; puis elle les essuyait avec ses cheveux, les couvrait de baisers, les oignait de parfum. À cette vue, le pharisien qui l’avait invité se dit en lui-même : « si cet homme était prophète, il saurait qui est cette femme qui le touche, et ce qu’elle est : une pécheresse ! »

(blabla de Jésus avec une parabole)

Jésus dit à la femme : « Tes péchés seront remis ». Et ceux qui étaient à table avec lui se mirent à dire en eux-mêmes : « Quel est cet homme qui va jusqu’à remettre les péchés ? » Mais il dit à la femme : « Ta foi t’a sauvée ; va en paix ».

Il est tentant d’identifier la femme pécheresse avec « LA » pécheresse, c’est-à-dire Marie-Madeleine, mais certains penchent aussi pour Marie de Béthanie (la sœur de Marthe et Lazare).


Là où c’est un peu perturbant est que le Lavement des pieds est aussi l’acte accompli par Jésus, lavant les pieds des apôtres, avant de s’attabler pour la Cène (on se situe donc le jeudi saint). C’est un geste honorifique dans l’antiquité gréco-romaine-proche-orientale (il y a plein de références sur la page Wikipedia), qui fait toujours partie des rites du monde chrétien.

 

Ces trois appellations créent un peu de confusion.

L’ensemble est propice à la représentation d’immenses tablées, avec des convives, des serviteurs, des chiens, des curieux, des trucs et des machins, un régal de peinture.


Nous commençons donc avec le boss du jour : Véronèse.



Véronèse, Le Repas chez Simon, 1570, Brera, 7 mètres de long et 2,75 mètres de haut. La scène principale est reléguée sur le côté gauche, vers lequel se tournent tous les regards - ce décentrement est plutôt habile pour introduire du mouvement. Les visages et les attitudes traduisent la curiosité, l'incrédulité, la réprobation (on les imagine bien avec leur téléphone pour filmer la scène). Il y a une scène symétrique à droite, mais j'ai du mal à comprendre de quoi il s'agit. Le repas a lieu dans un palais à l'antique, dans une architecture palladienne, avec colonnes de marbre, dallage, petite arcade au fond du jardin. Bien sûr, l'oeil se perd dans les détails. Les serviteurs, qui sont des enfants, noirs et blancs, devant la table. Je m'interroge sur les proportions, car Jésus et la pécheresse me semblent petits par rapport aux autres figures.

Malgré la profusion, la toile respire une certaine austérité - accumulation de ces visages sévères ?




 

Véronèse, Le Repas dans la maison de Simon, 1555, Turin, 3 x 4,5 mètres, et c'est nettement plus animé, en partie grâce à ce format presque carré, qui permet une accumulation de figures. Jésus a plus l'allure d'un pacha que d'un modeste prophète et la pécheresse est somptueuse. Il y a un perroquet, un vase qui va tomber du plateau, des serviteurs noirs, des chiens, des couleurs...

Sur le côté gauche, il y a un palais en construction et des gens dont je ne sais pas trop ce qu'ils font.





Une pièce en albâtre, peinte, fabriquée en Angleterre au 15e siècle, conservé à Lille. L'objet est particulièrement beau. D'un point de vue iconographique, on voit bien une contamination entre le thème du "repas chez Simon" et celui de la Cène. Si les chiens apportent une présence familière et sympathique, les os ne sont pas sans faire penser à ceux du Golgotha.
En tout cas, la rangée de petits petons sous la table est très réussie.

Une peinture anonyme française du XVe siècle (conservée à Lille). Le repas se tient dans une demeure bourgeoise : tenture et cuir au mur, lustre, horloge, vitre à la fenêtre. Le décor fait penser aux peintures de Van Eyck.

Simon et son entourage sont vêtus de vêtements de couleurs vives, de fourrures et de beaux chapeaux, même si le repas est très simple (là encore, cette table annonce celle de la Cène).

Il n'y a aucune femme à table - il n'y en a pas beaucoup chez Véronèse non plus, même si la présence des servantes brouille un peu le regard. Les peintures de Véronèse sont destinées à orner les réfectoires de monastères et il n'y a pas de femme à table. Chez ce peintre anonyme, on voit bien que dans une maison comme il faut, les femmes ne s'attablent pas avec les hommes.

La pécheresse est quasiment allongée sur le sol : alors que les autres hommes semblent s'essuyer les pieds sur son dos elle embrasse dévotement le pied de Jésus, Jésus très sobrement vêtu d'une tunique noire.


Un vitrail de 1250, provenant du couvent des Madelonnettes de Hagueneau (conservé à Lille). Au Moyen Âge, on accepte la présence d'une dame à table ! Et les plats regorgent de poissons ! Les couleurs de ce vitrail sont magnifiques et intenses. Et le dessin de la nappe, des plats et des visages est très réussi.


Les épisodes précédents : Baptême de Jésus ; Jésus soumis à la tentation ; enseignement et miracles de guérison ; miracles aquatiques

La semaine prochaine sera plus allégorique.


4 commentaires:

  1. C'est sûr qu'il y a plein de Marie, on a tendance à confondre...(m'en parle pas, je viens de me relancer dans la généalogie, et à une époque, allez hop, mêmes prénoms...)

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  2. @Keisha : Ah oui, Cent ans de solitude n'a rien inventé !

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  3. je viens de faire ma balade dominicale dans l'art et c'est bien
    Question repas je crois quand même que mon préféré c'est la Cène de Léonard

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  4. @Dominique : on mange plus chez Véronèse quand même...

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