Virgile, L’Énéide, traduit du latin par Paul Veyne, écrit quelques
dizaines d’années avant l’ère chrétienne, Albin Michel, 2012.
Je me suis offert le petit
plaisir de relire L’Énéide, texte
traduit au lycée, lu ensuite dans une édition de poche et savouré avec plaisir
dans la traduction de Veyne. Ce fut une lecture aisée et fluide.
Le fil narratif : Énée (fils
de Vénus) réchappe de Troie et se lance sur les mers, de rivages hostiles en
rivages hospitaliers. Parmi les escales notables, une à Carthage chez la reine
Didon et une autre en Sicile pendant laquelle Énée visite les Enfers. Il arrive
finalement sur les côtes italiennes où, après avoir mené une dure guerre contre
Turnus, il parviendra à fonder une cité promise à un futur glorieux, Albe, ancêtre de Rome.
Face au vestibule, à même le
seuil de la porte d’entrée, Pyrrhus se pavane ; ses armes et le bronze de
sa cuirasse jettent des éclairs. C’est comme un serpent, nourri d’herbes
vénéneuses, qui reparaît à la lumière ; son enflure était abritée sous
terre par la froidure hivernale, mais maintenant il a fait peau neuve et brille
d’une nouvelle jeunesse : il se redresse face au soleil, déroule ses
anneaux visqueux et fait vibrer dans sa gueule sa triple langue.
Bousseau et Lepautre,
d'après une esquisse de Girardon,
Enée portant son père Anchise, suivi d'Ascagne
1697-1716, musée du Louvre, image RMN.
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On a en général une image d’Énée comme un héros un peu pâle et froid. Mais le texte est d’une grande puissance, avec des comparaisons pleines de sens et de couleurs, avec de nombreux épisodes de combats très violents, avec des détails très crus, des scènes de deuils, ou de très beaux monologues (émouvant moment de rencontre entre Andromaque et Énée par exemple). Cela rend bien la puissance du destin qui surplombe le héros et annonce la ville hors norme qui sera issue de cette histoire. Un récit où la poésie est réelle car les personnages de L’Énéide connaissent L’Iliade et la geste homérique.
Turnus, lui, est en rage et
s’équipe en hâte pour la bataille : au même instant, il était déjà revêtu
de sa cuirasse rutilante qui le hérissait d’écailles de bronze et il avait
enfermé ses jambes dans de l’or ; la tête encore nue, il venait d’attacher
son épée à son flanc ; descendant en courant de la haute citadelle, tout
en or, il était resplendissant. Il brûle d’envie de se battre et son espérance
lui rend l’ennemi déjà présent.
Le Bernin, Énée et Anchise
Rome, galerie Borghèse, image RMN.
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C’est un texte violent où les récits de combats et de massacre sont nombreux, où les lamentations des personnages (comme Didon, ou le père de Pallas) sont touchantes devant la dureté et l’injustice du destin. La traduction de Veyne rend la force d’un texte aux détails puissants et frappants.
Oui, certains passages échappent un peu à notre sensibilité (ah les fameux récits de combats !) mais d’autres nous touchent toujours.
Les notes sont parfaites : informatives et ironiques, soulignant les petites incohérences et habiletés de Virgile.
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