Flaubert, Un cœur simple, 1877.
J’ai relu récemment cette longue
nouvelle, narrant la vie de Félicité, une bonne, au cœur simple, dont un esprit
fort et peu humain se moquerait certainement, mais qui suscite aussi beaucoup
d’affection.
J’ai vraiment apprécié cette
relecture, car chaque mot est choisi, chaque détail fait sens : le
meubles, les motifs des tissus, les prénoms des enfants… C’est un panorama
complet. Cela vaut la peine de lire lentement pour savourer la moindre
trouvaille de l’auteur.
L’usage du discours indirect
libre est brillant. L’auteur fait ainsi venir dans le fil du récit les pensées
et les paroles de Félicité, de sa maîtresse, de leur entourage, les « on-dit »
d’un village comme si elles venaient de l’auteur ou du lecteur, comme si ces
jugements n’en étaient pas, comme s’il s’agissait de descriptions. Un grand art
de l’écriture où ce qui semble simple et couler de source est en réalité le
produit d’un travail accompli sur la langue.
C’est tout à la fois ironique et
moqueur, touchant et émouvant. Du grand art.
Sisley, Gelée blanche. L'été de la Saint-Martin, 1874, Coll. privée. |
Contre toute attente, Félicité me semble avoir un
destin assez proche de Madame Bovary ou de Frédéric. Cette vie est une grande
solitude, un attachement vain à des êtres qui ne le leur rendent pas, des
illusions volontairement adoptées. À la fin, chaque personnage peut faire le
bilan de sa pauvre existence et se raccrocher à un rêve, à une image – à un
perroquet.
Il me semble aussi que les débuts
dans la vie de Paul, le fils, ressemblent à ceux du fils de Jeanne dans Une vie de Maupassant : le fils de
famille trop gâté qui boit et fait des dettes est un modèle bien répandu !
Mais ici Paul trouve sa voie et une femme qui le domine et le tient dans le
droit chemin.
Je n’ai pas pu m’empêcher enfin
de penser à Françoise, la bonne du narrateur de La Recherche, qui a elle aussi un neveu (qui fait la guerre il me
semble).
Elle jeta sur la berge un tas de
chemises, retroussa ses manches, prit son battoir ; et les coups forts
qu’elle donnait s’entendaient dans les autres jardins à côté. Les prairies
étaient vides, le vent agitait la rivière ; au fond, de grandes herbes s’y
penchaient, comme des chevelures de cadavres flottant dans l’eau. Elle retenait
sa douleur, jusqu’au soir fut très brave ; mais, dans sa chambre, elle s’y
abandonna, à plat ventre sur son matelas, le visage dans l’oreiller, et les
deux poings contre les tempes.
Mon premier billet sur Un coeur simple.
Madame Bovary, mœurs de province
L'Éducation sentimentale
Nous allions à l'aventure, par les champs et par les grèves (récit en Bretagne avec Maxime Du Camp)
Trois contes
Salammbô
Notes d'un voyage en Provence et en Italie
La Tentation de Saint Antoine
Voyage en Orient
L'Éducation sentimentale
Nous allions à l'aventure, par les champs et par les grèves (récit en Bretagne avec Maxime Du Camp)
Trois contes
Salammbô
Notes d'un voyage en Provence et en Italie
La Tentation de Saint Antoine
Voyage en Orient
Philippe Doumenc. - Contre-enquête sur la mort d'Emma Bovary
Biographie de Flaubert par Michel Winock
c'est vrai, je n'avais jamais fait le rapprochement avec Françoise mais je suis d'accord une lecture que l'on peut faire et refaire
RépondreSupprimerProust était un grand fan de Flaubert et en lisant la façon dont Félicité se lamente sur son neveu, ses inquiétudes, la façon dont il vient manger à l'office... Je verrai quand je relirai le Temps retrouvé !
Supprimer