Madame de Sévigné, biographie de Stéphane Maltère, 2013, Gallimard.
Ne connaissant rien de Madame
Sévigné (à part qu’elle avait écrit des lettres à sa fille, Madame de Grignan),
je me suis dit qu’avant de passer à une lointaine et future lecture de cette
correspondance, il serait intéressant de lire une petite biographie.
Comme d’habitude, je ne compte
pas vous faire le récit d’une biographie que vous trouverez par exemple ICI.
Les point qui m’ont intéressée :
D’abord cela permet de remettre
la marquise parmi ses contemporains. On oublie qu’elle était contemporaine et
amie de Madame de La Fayette et qu’il y avait tout un groupe de femmes nobles
et instruites, proches amies, qui ont formé le nœud de ses connaissances. Les
liens entre les hommes et les femmes, entre amour, amitié, galanterie,
pruderie… sont bien développés, avec leurs nuances qui nous échappent
aujourd’hui. J’ai apprécié que Maltère la désigne pour ce qu’elle était :
une Précieuse. Ce terme est plutôt connoté négativement (merci Molière) et de
ce fait, on hésite à l’accoler à la Sévigné. Mais tout chez elle indique
qu’elle en était une.
J’ignorais que Marie de Sévigné
était liée par la famille au cardinal de Retz. J’ai donc découvert sa proximité
avec la Fronde. Et également avec le jansénisme.
J’ai découvert qu’elle faisait
partie des bons vivants, connue pour ses bons mots, son esprit gaulois et
gaillard (les manuels nous avaient caché cet aspect). Sa préférence pour le
baroque Corneille me semble en accord avec cet appétit de vivre.
Je suis frappée par l’amour
dévorant, exigeant, surabondant qui la lie à sa fille. J’ai trouvé très
intéressantes les pages où est expliquée leur presque impossible cohabitation.
Sévigné était une grande
lectrice. Mais au XVIIe siècle, le genre romanesque débute :
une centaine de romans paraissent avant sa naissance et 35 (35 !) pendant
son adolescence. Il y avait bien d’autres lectures : poésies, morales,
maximes, piété…
Tout n’est pas que mots d’esprit.
Tous les hommes d’importance font la guerre et leurs blessures rythment la vie
des femmes. C’est un siècle dur, où les enfants meurent tôt et où chaque
grossesse est un risque mortel.
C. Lefebvre, Marie de Rabutin-Chantal, marquise de Sévigné, 17e siècle, Paris, Musée Carnavalet, image RMN. |
Et ma foi, vous avez raison, car enfin la jeunesse n’a que du vert, et nous autres gens d’arrière-saison, sommes de cent mille couleurs, les unes plus belles que les autres.
Cependant, je ne suis pas
satisfaite de cette biographie.
Elle est surtout factuelle :
des noms et des dates. On est noyé sous les noms de nobles qui sont tous
cousins sans que l’on ne comprenne l’intérêt de ces fréquentations (alors que
c’est si important pour l’Ancien Régime !). Il y a de vrais trous :
le rapport à la Cour, la question de la gestion des terres (cf. Arthur Young), ce que Sévigné pensait de la Fronde…
Il manque également un peu
d’analyse littéraire : la dimension codée de la littérature mondaine,
l’importance du genre de la correspondance au XVIIe siècle, à la
fois privé et public, à une époque où il faut au moins 20 jours pour relier la
Bretagne à la Provence.
Si Maltère souligne lui-même
qu’aucun événement ne structure particulièrement la vie de celle qui fut
d’abord une femme du monde, c’est précisément au biographe de faire ce choix de
mettre l’accent sur tel ou tel aspect et d’adopter un point de vue.
Enfin, pas un mot sur la fortune
critique et le devenir posthume de l’œuvre de Sévigné.
Par ailleurs, les extraits qu’il
donne de la correspondance donnent envie de se plonger dans ce XVIIe
siècle si vivant. Cette langue-là me plaît.
Hélas ! que vous vais-je
dire du milieu de mes bois ?
Je découvre que Sévigné donne une
description des cures thermales de Vichy – je me demande si elle n’est pas une
des premières à évoquer ce genre d’établissement.
LCA avec George.
Difficile les bio, ou trop ou trop peu, j'ai lu celle de Roger Duchêne et je me suis copieusement barbée
RépondreSupprimeren fait un seul remède lire la Marquise mais vrai que parfois quelques notes nous aideraient
Il est vrai qu'elle n'a pas une vie a priori palpitante. Mais c'est le travail du biographe de structurer, choisir, mettre des éléments en valeur...
RépondreSupprimerC'est Bathilde, la grand-mère de Marcel, qui m'a poussée à lire les lettres de la marquise ! Certaines sont passionnantes et modernes. Je n'ai pas lu cette biographie, mais je recommande le "Découvertes Gallimard" qui lui est consacré, très imagé, complet et vivant.
RépondreSupprimerPas fan de biographie, mais j'aime bien ta citation.
RépondreSupprimerVoilà j'ai publié mon billet ce matin ! comme toi je regrette que le biographe ne parle pas du devenir des lettres, quand et comment elles ont été publiés autrement que dans les mémoires de Bussy-Rabutin et aussi le manque d'analyse littéraire, mais cette biographie est finalement comme une première approche qui reste intéressante.
RépondreSupprimerGrillon : c'est vrai que la famille du narrateur est très fan de la marquise.
RépondreSupprimerGeorge : j'irai lire bientôt ton billet.