Mark Twain, Quand Saton raconte la terre au Bon Dieu, traduit de l’américain
par Bernard Grasset, publié aux États Unis en 1962, textes écrits on ne sait
pas trop quand, édité en France chez Grasset.
Ce volume a été constitué après
la mort de Twain en piochant dans l’énorme masse de manuscrits laissés par
l’écrivain. Il ne présente pas vraiment d’unité – ou comment des éditeurs
peuvent gâcher l’œuvre d’un auteur.
Bref.
Une bonne partie des textes
relève de la satire contre la religion, notamment chrétienne, et contre la
supposée morale. C’est extrêmement brillant. Je suis moi-même athée, mais très
vite agacée par l’anticléricalisme primaire. Mais Twain livre un discours
décapant, extrêmement construit, plein d’humour et d’intelligence. J’apprécie
d’autant plus ses réflexions sur les premiers pas de l’humanité – supposément
en suivant le récit biblique. Les textes s’inscrivent dans la lignée du Journal d’Adam qui est une merveille
d’humour, qui montre tout l’attachement que Twain a pour l’être humain et où
Adam est un grand dadais sympathique. Nous retrouvons ici quelques pages du
journal d’Ève, de Noé, de Mathusalem, de Sem. L’auteur prend au pied de la
lettre certaines mentions bibliques : l’âge de Mathusalem, trop jeune pour
se marier à 60 ans, Noé contraint de sauver tous les animaux et donc envahi par
les mouches et les virus – et refusant de sauver les dinosaures ou encore le rôle
indispensable de l’huître dans la Création de l’homme. Cette fausse naïveté est
à la fois plaisante et ravageuse.
La critique contre les
institutions est féroce, ainsi que celle contre les certitudes, les habitudes
sociales, mais le regard amusé ou touché par ce pauvre être humain pas très
dégourdi reste là. Plusieurs textes s’en prennent aux divers conflits religieux
qu’a connus l’humanité.
Je trouve que souvent les textes
de combat politique ont vieilli. Je suis frappée du contraire dans le cas de
Twain. Les pages dénonçant le va-t’en-guerre des États Unis contre les
Philippines, contre la pudibonderie s’adresse à toutes les époques. Ces textes
courts sont extrêmement construits. Il est difficile d’isoler une ou deux
phrases, car l’humour réside sur une narration finement amenée, tournant
lentement vers l’absurde. C’est tout l’art de mettre en situation.
Ensuite… il y a un texte brillant, très juste et plein de mauvaise foi au sujet de La Terre de Zola (que j’ai scanné et que vous pouvez lire), des textes sur Londres et ses monuments, une parodie des conseils de bonnes manières à tenir en cas d’incendie.
Noé et sa famille furent sauvés,
certes, mais ils ne se sentaient pas à l’aise : ils étaient pleins de
microbes. Ils en avaient jusqu’aux sourcils, ils en étaient gonflés comme des
ballons, obèses, distendus. C’était une situation déplaisante, mais inévitable,
parce qu’il important que fût assuré le salut d’une quantité de microbes
suffisante pour transmettre aux futures espèces humaines des maladies
dévastatrices, et il n’y avait que huit personnes à bord pour leur servir de
pension de famille.
Le teste sur "La terre" est fameux !!! :)
RépondreSupprimerUne convertie !
SupprimerMerci Nathalie pour le commentaire sur Zola
RépondreSupprimeret pour ce texte sur Mark Twain que je vais lire ... Un jour un jour c’est sûr ! Ysa
Au moins tu connais quelqu'un qui peut te le prêter !
SupprimerAh, je ne connais pas ce recueil Grasset fourre-tout, mais j'avais chroniqué l'ouvrage posthume conçu sous le titre "Lettres de la terre" que le recueil semble englober... Je pense que Twain aurait pu lui donner une unité plus visible s'il avait eu le temps de le parachever (au lieu de cela, il a été mis "sous le boisseau" par sa fille après sa mort!).
RépondreSupprimer(s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola
Et ce n'est pas facile de s'y retrouver pour nous, entre toutes les éditions de recueils d'articles, de conférences. J'avoue que je m'y perds un peu.
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