Quelques moulages de l'Accademia di Belle Arti. Se côtoient les colossaux moulages des Dioscures, des esclaves de Michel-Ange, de la Vénus de Milo, des frises du Panthéon (originaux au British Museum)... L'Antiquité grecque et romaine et la Renaissance italienne !
Du plâtre, à Rome.
Lors de mon séjour à Rome j'ai pu assister à une
journée d'études consacrée aux collections de moulages en plâtre dans les académies
de peinture, écoles de beaux-arts et institutions pédagogiques. Et là vous me
dites : aller à Rome pour voir du plâtre alors qu'il y a des milliers d'œuvres
en marbre magnifiques ? Elle est folle...
Galerie des moulages de l'Université de la Sapienza : une histoire complète de la sculpture.
À partir de la Renaissance, l'Europe se construit comme héritière de l'Antiquité. Il s'agit essentiellement de l'Antiquité romaine, car on ne fait pas trop la différence entre Rome ou la Grèce (voir l'article sur Winckelmann). Ceux qui le peuvent (artistes, écrivains, princes, aristocrates, négociants, prélats) entreprennent le voyage à Rome (Du tourisme à Rome). Rome est la ville des empereurs, mais le faste et la puissance appartiennent aussi aux papes. C'est également la ville des arts et des créateurs géniaux. Revenu chez lui, le visiteur essaie de s'entourer des merveilles vues pendant son voyage par goût, pour épater la galerie et montrer sa culture et sa richesse. Quand on est un roi ou un prince on essaie de s'approprier la magnificence des papes et des empereurs. Bref, on veut des sculptures antiques dans son jardin ou sa bibliothèque (même quand on n’a pas effectué le voyage à Rome d’ailleurs).
Les moulages permettent de rassembler en un lieu toutes les statues célèbres de Vénus, dont les originaux sont éparpillés dans tous les musées du monde ! Voilà comment les artistes pouvaient comparer les plus beaux modèles, se former l'oeil et la main. Et quand on a une oeuvre antique sans bras ni jambe on peut proposer des essais de reconstitution.
Galerie des moulages de l'Université de la Sapienza.
Copies d'éléments des frontons du temple d'Aphaïa d'Égine, dont les originaux se trouvent à la Glyptothèque de Munich. Notez qu'ils sont placés à hauteur des yeux, ce qui est bien pratique.
Galerie des moulages de l'Université de la Sapienza.
La première commande date de François Ier qui charge
Primatice de copier les antiques du Vatican pour orner la cour de
Fontainebleau. Ses successeurs firent de même.
Et puis il y a des oeuvres que l'on voit mieux en copie... les copies de la relief de la colonne Trajanne qui sont en vrai totalement inaccessibles.
Gypsothèque de la Villa Médicis.
Les moulages en plâtre ont aussi permis la constitution de musée de sculptures et d’architecture. La Cité de l’architecture est l’héritière du Musée des monuments français qui montre les chefs d’œuvre de l’art médiéval français. Certaines pièces sont des témoignages de sculptures qui ont pu être détruites et ne sont donc connues que par leur moulage. Cela permet aussi d’organiser des expositions (il est difficile de déplacer un portail de cathédrale gothique).
Moulage de l'ange de la cathédrale de Reims : cet emblème a été exposé à Rome en 1919 pour que les Italiens découvrent les beautés de l'art gothique français juste après la Première guerre mondiale et les destructions opérées par l'ennemi allemand.
Réserve de la gypsothèque de la Villa Médicis.
Ce qui est fascinant aussi dans les plâtres, c'est que l'on voit les traces du travail du mouleur. On peut examiner de très près ces objets qui deviennent alors fascinants.
Gypsothèque de la Villa Médicis.
Les petites lignes qui strient ce visage sont
celles des différents moules utilisés pour réaliser le moulage. Quand on a en
effet un buste de marbre dont on veut réaliser une copie, on ne peut pas
utiliser un seul moule parce qu'on ne le pourrait pas le démouler ("il y a
le nez qui coince et l'oreille qui bloque"). On fait donc des moules pour
les différentes parties. En assemblant ces moules, on peut alors réaliser le
moulage. En général, un travail de polissage supprime ensuite ces traces du
travail, d'autant que l'œuvre en plâtre est souvent recouverte d'un
badigeon.
Gypsothèque de la Villa Médicis.
Vous vous doutez que ces immenses collections de
plâtre ont connu des vicissitudes. Les écoles des beaux-arts ne s'appuient plus
autant sur le dessin et encore moins sur le dessin d'après les plâtres. On
s'est attaché presque exclusivement aux oeuvres originales et on a eu du mal à
voir l'intérêt de ces vulgaires copies. Il suffit de laisser faire le temps et
l'eau pour réduire à néant une collection de plâtre. Heureusement le travail de
restauration permet non seulement de retrouver ces œuvres, mais en plus de
mieux comprendre leur réalisation.
Ci-dessus un élément du groupe des Niobides et le Christ de la Pietà de Michel-Ange dans les réserves de la gypsothèque de la Villa Médicis.
On retrouve les morceaux, on ficelle, on attache, on étiquette... Réserve de la Gypsothèque de la Villa Médicis.
Les moulages sont aussi un outil pour les
archéologues, avant la modélisation en 3D. Quand on trouve une statue antique
mutilée, on peut essayer de reconstituer la position des bras ou les objets qui
accompagnaient le personnage (plutôt une épée, une lance, une
offrande ???).
Les galeries de moulages se visitent à Montpellier, à
Rome, à Londres, à Strasbourg, à Paris et ailleurs.
Je vous invite à lire les articles de Peccadille qui explique bien mieux que moi :
- le récit d'une vente aux enchères de plâtres.
Et beh, voilà qui est passionnant !!
RépondreSupprimerEt peu connu en plus !
Supprimerde quoi regarder d'un autre oeil le plâtre en effet!
RépondreSupprimerUn témoin de l'histoire et de l'histoire de l'art et une oeuvre d'art.
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