La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



jeudi 12 avril 2012

Un peu hésitant, moins sûr de la fidélité de ses propres souvenirs, et ne sachant plus très bien combien de flaques lumineuses jalonneraient sa rue nocturne.


Thomas Pynchon, V., traduit de l’américain par Minnie Danzas, 1e édition 1963, Paris, Seuil, 1985.

Résumer un roman de Pynchon relève toujours du défi olympique… mais je me lance bravement.
Le premier fil du récit (ou plus exactement le premier écheveau, vu l’embrouillaminis) tourne autour d’une poignée de jeunes gens, actifs à New York, vers 1955-1956. On s’attache à Profane, ancien membre de la marine militaire américaine, à sa rencontre avec Rachel (dont vous avez ici le récit), et à quelques zigotos de son acabit. Profane fait le yoyo, c’est-à-dire qu’il va d’un lieu à l’autre et revient, sans but réel, mené par les événements et l’alcool. Quelques bagarres mémorables, des boulots originaux (chasseur d’alligators dans les égouts de New York) le mènent. Parmi ses connaissances, Herbert Stencil, un homme curieux animé d’une quête personnelle.
Stencil – qui parle de lui à la 3e personne – a trouvé trace dans les papiers de son père d’une mystérieuse V. Est-ce une femme ? cette Victoria présente au Caire au moment de Fachoda ? une espionne ? Veronica, un rat femelle convertie au catholicisme par un curé new-yorkais ? Est-ce une ville lointaine (rappelant celle évoquée dans Contre-jour), à la tête d’un réseau de tunnels reliant le pôle Sud au volcan du Vésuve ? Est-ce une automate ? (car les êtres automates hantent tout le roman, apparaissant, disparaissant de manière inattendue). Stencil cherche, il erre de Florence (avec des espions du Venezuela) (ou le vol d’une Vénus de Botticelli) au Caire, écoute le récit des féroces répressions allemandes en Afrique du Sud (le récit en est proprement terrifiant), n’oublie pas les théâtres parisiens mais reste fasciné par La Valette à Malte.

Vous n’avez rien compris ? C’est bien normal. Stencil est un personnage obsédé par l’idée d’un complot autour de V., partant sur la moindre trace que lui laissent les illuminés trouvés sur sa route. Les épisodes rocambolesques se succèdent, et on oublie vite la chronologie de l’ensemble. Pynchon excelle dans l’art de lancer des pistes, des indices à multiples sens, les motifs se retrouvent de chapitres en chapitres et le lecteur peut en devenir fou.
Un résumé ordonné du livre sur Wikipedia.

Pynchon apparaît dans un épisode
des Simpsons "Diatribe of the Mad Housewife"
Image Wikipedia.
Cette semaine-là, ils avaient expérimenté le lait, le potage de légumes en boîte et, en désespoir de cause, le jus d’une tranche de pastèque desséchée, qui seule garnissait le réfrigérateur de Teflon. Essayez, un jour, de presser une pastèque dans un petit verre, quand vos réflexes laissent à désirer. C’est quasiment impossible. D’autre part, le repêchage des grains dans la vodka n’était pas non plus une sinécure et provoquait une mauvaise volonté croissante et mutuelle.

La langue est très maîtrisée, mais légère et irrévérencieuse ce qui n’empêche pas des passages d’une grande poésie. 
V. est le premier roman de Pynchon mais vous pouvez lire mon billet sur Vice caché. Ce billet aurait pu prendre place dans le challenge d'Yspaddaden, catégorie "pavé" mais Pynchon n'était pas dans la liste initiale et donc... non ! Tant pis je me débrouillerai autrement...


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