Honoré de Balzac, La Duchesse
de Langeais, 1834.
Lors du premier chapitre Balzac
nous plonge dans une atmosphère étrange et hors du temps. Nous sommes sur une
île au large de l’Espagne, dans un couvent inaccessible. Un officier de l’armée
française débarque et à l’écoute de l’orgue lors de la messe sait qu’il a
retrouvé celle qu’il pourchasse depuis des années. Lui, c’est Armand de
Montriveau. Elle, c’est Antoinette, duchesse de Langeais, devenue sœur Thérèse.
Il existe entre eux un amour violent.
Mais… brusque retour en arrière.
Des années auparavant quand ces deux-là se sont rencontrés à Paris, dans les
salons aristocratiques de la Restauration... Ici se place une évocation nostalgique des supposés salons mondains de l'Ancien Régime.
J’ai plutôt aimé ce roman. J’ai
apprécié le début, brutal et exotique, peu balzacien, qui est la marque de l’Histoire
des treize. On retrouve également ces
hommes masqués, aptes aux coups de force, qui donnent une couleur aventureuse à
cette histoire d’amour parisienne. Les héros m’ont moins plu, surtout
Antoinette, une petite sotte à mon goût (même s'il faut faire la part des réflexions sexistes pénibles de Balzac). Son évolution psychologique me semble
peu vraisemblable. En revanche, j’ai apprécié la note stendhalienne du
roman : le thème de l’enlèvement d’une femme du couvent relève des Chroniques italiennnes. Quant à la vanité
d’Antoinette, elle fait penser à celle de Mathilde de La Mole dans Le
Rouge et le noir (paru en 1831). Armand est un
peu mieux traité (il offre à l’auteur un miroir plus valorisant) avec
son aura d’explorateur.
Le dénouement me plaît parce qu’il accole le romantisme
du XIXe siècle (vision stéréotypée de l’Espagne, goût du pathétique) à une certaine
ingénierie à la Jules Verne (rien compris à cette histoire de câble). L’Histoire
des treize allie passions mystérieuses et
violentes et hommes d’action, c’est plutôt un bon mélange.
Saint-Pétersbourg, statue de Balzac par Rodin. photo M&M. |
Il l’avait déjà dit vingt fois,
ou plutôt la duchesse l’avait vingt fois lu dans ses regards, et voyait, dans
la passion de cet homme vraiment grand, un amusement pour elle, un intérêt à
mettre dans sa vie sans intérêt. Elle se préparait donc déjà fort habilement à
élever autour d’elle une certaine quantité de redoutes qu’elle lui donnerait à
emporter avant de lui permettre l’entrée de son cœur. Jouet de ses caprices,
Montriveau devait rester stationnaire tout en sautant de difficultés en
difficultés comme un de ces insectes tourmenté par un enfant saute d’un doigt
sur un autre en croyant avancer, tandis que son malicieux bourreau le laisse au
même point.
Je vois qu'on a bloqué sur les mêmes points : le sexisme de Balzac et le manque de vraisemblance du revirement. Et dire qu'il était super content de lui et qu'il trouvait que c'était avec le personnage d'Antoinette qu'il avait dépeint la femme avec le plus de justesse... Il n'y était pas tout à fait!
RépondreSupprimerJe me suis permis de te faire passer au dernier niveau pour le challenge, comme tu m'as l'air bien lancée. :-P
Moi qui avait fièrement annoncé que j'étais venue à bout du challenge Balzac... bon tu as raison, je ne vais pas m'arrêter en si bon chemin !
RépondreSupprimerBah comme tu en es déjà à 7 lectures sur 6 et que tu comptes poursuivre avec Ferragus, ça me semblait logique, mais je te redescends au niveau antérieur si tu préfères.
RépondreSupprimerNan mais je crains dégun ! De toute façon je veux lire tout Balzac, alors...
RépondreSupprimerJe vois que tu avais pensé aussi à Mathilde de la Mole. Je suis d'accord avec toi, la duchesse de Langeais est un personnage antipathique. Quant à son revirement, il n'est pas vraisemblable à moins que l'on considère que c'est une femme qui ne peut respecter qu'un homme qui la soumet; rapports de domination et d'orgueil plutôt que d'amour.
RépondreSupprimerJ'avais eu l'impression aussi d'une héroïne soumise aux solides opinions sexistes de son créateur, fabriquée en quelque sorte, et manquant donc de crédibilité.
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