Antoine Sénanque, L’Homme
mouillé, Paris, Grasset, 2010.
J’avais acheté ce roman il y a un
certain temps et plusieurs avis positif sur son dernier roman (Salut Marie, les avis de Stephie et d'Assouline)
m’ont incité à le sortir enfin. Je ne regrette pas. C’est un roman court mais
très maîtrisé.
L’action est à Budapest, en 1938.
Pal Vadas est un employé des postes ordonné, qui a la vie la plus indifférente
possible : pas de microbe, pas de désordre, pas d’imprévu. Mais un jour,
il se réveille humide : son corps sécrète de l’eau, de l’eau de mer plus
exactement. Face à cet événement mystérieux et incompréhensible, Vadas perd
lentement ses certitudes. Enrôlé sans rien maîtriser dans les réunions des
phalanges d’extrême-droite, les services sanitaires l’extraient de chez lui car
son corps menace d’inonder l’immeuble.
Il passe de médecin en médecin,
objet d’examen et de méfiance, placé sous observation médicale et politique.
Pendant ce temps, la Hongrie se rapproche de la guerre, vote des lois raciales,
est de plus en plus méfiante envers Vadas. Le pays est marqué par le découpage
européen de l’après 1e Guerre mondiale.
Pal Vadas se laisse envahir par
l’eau comme la Hongrie est envahie par le fascisme, de manière honteuse et
inexorable. Il a l’impression de contenir la rumeur, les cris, les cauchemars
du pays. Si le personnage n’est qu’indifférence, il semble que son eau puisse
prendre des décisions étranges comme si elle était l’expression de son
intériorité.
Le début :
Pal Vadas se réveilla recouvert
d’eau salée.
Il trouva ses draps imbibés d’une
eau sombre qui avait pénétré son matelas. Une ligne humide et froide marquait
les contours de son corps. Le tissu de sa veste pesait sur sa peau. Ses mains
étaient moites.
La chaleur de la nuit avait été
inhabituelle, en ce mois de mars 1938. Il fut surpris par l’abondance de cette
sueur et s’étonna de ne pas ressentir le besoin de boire.
Guillaumin, Tempête de vent d'est à Agay, Rouen, musée des Beaux-Arts, image M&M. |
Ce n’est pas une fable symbolique ou allégorique. Le roman raconte le basculement de la Hongrie alors que Pal Vadas déborde de toutes parts, sans pathos, sans analyse psychologique. Il ne s’agit pas non plus d’un livre d’histoire politique, les événements n’étant présents que sous forme allusive. Tout est présenté avec précision factuelle et délicatesse. Le livre est court (200 pages), la langue est très tenue, lente, jouant d’une corde basse. Vadas est apparemment sans intériorité ou affectivité mais vit de plus en plus en fonction de son eau, incarnant des sentiments venus du plus profond de l’humain – sans un mot de trop.
Les avis de Pierre Assouline, de Christophe Bys
Bonjour !
RépondreSupprimerPas tentée par ce livre.
Il faut dire que... j'ai une PAL à abattre !!!
Tant pis, il est très bien pourtant.
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