Ernst Renan, Souvenirs
d’enfance et de jeunesse, publication en
feuilleton dans La Revue des Deux-Mondes, en livre en 1883. Lu en Folio.
Le premier ouvrage de Renan que
je lis. Je suis très intéressée par ce bonhomme ! Renan conte ici son
enfance en Bretagne, avec l’éducation donnée par les moines d’un petit couvent.
Destiné presque naturellement à la cléricature, il continue ses études dans
divers séminaires parisiens avant de quitter la soutane. Le livre s’arrête à
ses premiers pas dans le monde, allant ainsi jusqu’à cette jeunesse attardée.
La vision de la Bretagne (raison
pour laquelle j’ai lu le livre) est très belle. C’est l’écho d’un monde disparu
avec tous ces petits couvents, ces gens parlant breton, ce pays où la mémoire
violente de la Révolution est toute proche. Par ailleurs, nous ne sommes pas
dans les Chouans de Balzac et son romantisme,
donc il y a peu de place au pittoresque breton.
Phénomène curieux : Renan a
des préoccupations très éloignées des miennes mais il s’exprime dans une très
belle langue et avec beaucoup d’humanisme, ce qui finalement rend le texte très
intéressant et riche. Les termes sont choisis avec soin, et on sent de la
retenue pour parler de soi. Je devine toute proche la langue du XVIIe
siècle, les alexandrins venant naturellement sous la prose.
Les Hommes d'Aujourd'hui : Ernest Renan
par Cohl Emile, musée
d'Orsay, image RMN
|
Autre interrogation : Renan
est contemporain de Flaubert (2 ans les séparent) mais les différences
d’éducation et de culture sautent aux yeux. Sont-ils vraiment de la même
génération ? Je n’ai pu m’empêcher de penser à George Sand, qui est née
presque 20 ans avant Renan, qui s’est beaucoup intéressée à la question de l’éducation
et qui connaît bien la campagne mais qui est pleinement inscrite dans la
modernité. Renan semble parler depuis une époque bien plus ancienne alors que
ses autres écrits le campent bien dans son siècle. Il fait pourtant une fine
allusion à Madame Bovary, ce qui montre son estime pour Flaubert. J’aime toujours remarquer que cohabitent ainsi des
gens ancrés dans des mondes très différents.
Les dieux passent comme les hommes, et il ne serait pas bon qu’ils fussent éternels. La foi qu’on a eue ne doit jamais être une chaîne. On est quitte envers elle quand on l’a soigneusement roulée dans le linceul de pourpre où dorment les dieux morts.
La petite difficulté de ce livre,
ne le cachons pas, est dans le détail des enseignements des différents séminaires.
Ce sont des passages ardus mais où Renan montre sa grande attention aux êtres
humains, en l’occurrence aux caractères de ses professeurs.
Je note son admiration sans borne
pour le Parthénon athénien, comme une révélation.
LCA avec Claudia Lucia pour son challenge breton. Son avis.
Je viens de lire ton billet sur Renan, un avis que je partage. Des passages longs, parfois ennuyeux mais beaucoup d'idées intéressantes. Je me sens à la fois très loin de ses préoccupations mais en même temps il m'intéresse sur des sujets qui, à priori ne devraient pas me toucher. La phrase que tu cites sur les dieux morts est vraiment très belle. J'ai terminé ma lecture; je publierai mon billet Lundi.
RépondreSupprimerJ'ai hâte de lire ton avis alors ! C'est un auteur très intéressant en dépit de la distance qui nous sépare de lui.
RépondreSupprimer