Honoré de Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes,
1833-1847.
Ce roman est la suite d’Illusions perdues. Balzac se donne le
plaisir d’un début in medias res et
j’avoue avoir été perdue. Heureusement, ensuite, les liens entre les deux sont
plus lâches, même si je regrette de n’être pas plus physionomiste en
littérature que dans la vraie vie et avoir du mal à situer bon nombre de
personnages.
Nous retrouvons notre ami Lucien,
toujours aussi faible et influençable, mais riche et heureux. Il est le favori
d’un prêtre inquiétant sous les traits duquel le lecteur reconnaît vite le
Vautrin du Père Goriot. Premier
mystère : la nature de la relation entre ces deux-là. Et puis il y a
Esther, l’ancienne courtisane, touchée par l’amour comme d’autres sont touchés
par la grâce. Et le banquier Nucingen, quelques grandes dames, l’ambition, la
justice, etc.
Ainsi, la poésie de terreur que les stratagèmes des tribus ennemies en guerre répandent au sein des forêts de l’Amérique, et dont a tant profité Cooper, s’attachait aux plus petits détails de la vie parisienne.
J’ai beaucoup aimé ce roman, pour
sa richesse de personnages, l’entrelacs des intrigues et l’atmosphère policière
qui donne son rythme au récit. Vautrin déguisé est entouré par une foule de
criminels diverses, la police parisienne est de même bien représentée, le monde
mondain est lui aussi bien garni et tout cela crée de nombreuses occasions de
rebondissements. Difficile à la lecture du roman de ne pas se souvenir queBalzac et Vidocq ont rivalisé pour se raconter des histoires le temps d’un
dîner. Plusieurs personnages ont des facettes contrastées (notamment Nucingen
ridicule et touchant à la fois) ce qui rend le récit particulièrement
intéressant. Je note que Nucingen est désigné comme un loup-cervier,
c’est-à-dire une hyène, ce qui en fait une créature a priori peu sympathique.
Honoré de Balzac, buste en terre cuite vers 1891,
Rodin, New-York, The Metropolitan Museum of Art,
image RMN
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Parmi les bémols, les
considérations sur le fonctionnement de la justice qui plombent le récit. Et
surtout, l’usage de l’argot et l’imitation des accents et des défauts de prononciation. Cela m’a vraiment agacée. C’est un poil fatiguant à lire et on
est à la limite de la compréhension. En plus, Balzac choisit de souligner ainsi
le parler du juif allemand Nucingen (comme par hasard) et pas le prêtre espagnol,
dans le but de le ridiculiser, c’est assez désagréable et les connotations ne
sont pas en faveur de Balzac. Pour les mêmes raisons de compréhension, l’argot
des voleurs ne m’a pas trop plu, même si je vois bien son potentiel pour un
romancier.
Bref, un grand roman
balzacien !
L’auberge de Mansle, appelée La
Belle Étoile, avait pour maître un de ces gras et gros hommes qu’on a peur de
ne pas retrouver au retour, et qui sont encore, dix ans après, sur le seuil de
leur porte, avec la même quantité de chair, le même bonnet de coton, le même
tablier, le même couteau, les mêmes cheveux gras, le même triple menton, et qui
sont stéréotypés chez tous les romanciers, depuis l’immortel Cervantès jusqu’à
l’immortel Walter Scott.
dans l'atelier de Rodin toute une série de statues, en pied, buste ou têtes de Balzac
RépondreSupprimerhttp://miriampanigel.blog.lemonde.fr/2014/06/25/promenade-a-meudon-maison-et-atelier-de-rodin/
Oui !!! Il faut dire que Rodin a laissé un nombre incroyable d'esquisses pour son monument à Balzac et qu'elles ont été très photographiées.
RépondreSupprimerJe l'ai lu il y a super longtemps quand j'étais au lycée, je me revois encore en train de le lire. Autant te dire que j'en garde un souvenir à la fois précis et flou, mais je me souviens bien du parler allemand de Nucingen, et c'est drôle mais dans le Wilkie Collins que je suis en train de finir, il y aussi un personnage allemand et ses dialogues sont également retranscrits avec l'accent, mais là le personnage est plutôt sympathique.
RépondreSupprimerNucingen en lui-même est ambigu : financier loup cervier, amoureux ridicule mais touchant car sincère. Mais la façon dont Balzac se moque de lui m'a agacée (d'autant qu'il choisit de ne pas se moquer du prêtre espagnol).
SupprimerJ'en garde un bon souvenir mais il faut que je relise, le souvenir est lointain et puis à cause de son aspect foisonnant comme tu le soulignes.... Mais j'aime bien la démesure balzacienne !
RépondreSupprimerJ'imagine en effet qu'au fil des années on ne doit plus très bien se rappeler de tout.
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