Antoine Sénanque, Étienne regrette, 2014.
J’aime bien Antoine Sénanque,
mais je n’aurais sans doute pas lu de moi-même ce roman, car le sujet ne m’intéresse
pas du tout : l’histoire d’un enseignant qui pète un câble à la
cinquantaine. Mais le livre était au club de lecture, donc… Et finalement, bien
sûr, je suis ravie de ma lecture. Tout d’abord, parce que Sénanque renouvelle
le thème. Loin de la misanthropie et des récriminations habituelles, la
dépression du professeur l’emmène auprès d’un ami médecin légiste, d’une femme
pleine de vie et généreuse, dans le pays basque et face à un truand. Cela
change. C’est surtout la langue de Sénanque qui fait le charme du roman :
poétique et douce-amère à la fois, simplement posée et élégante.
Encore une fois un écrivain
parvient à insuffler de la fantaisie dans un roman a priori ancré dans un
contemporain entièrement gris. Mais Sénanque est d’une autre pointure que
Didierlaurent et ses personnages ont plus d’épaisseur. Que ce soit le
professeur dépressif, mais résistant à la peur, ou le médecin épicurien
craignant la mort, rien n’est simple. C’est le roman d’individus qui essaient
que leur vie ne soit pas une ligne droite, mais qui suivent la ligne
fantaisiste de poussières dans l’air et le soleil.
H. Hartung, Autoportrait, fusain, Centre Pompidou, RMN. |
Oui, un dermatologue. Les psys, c’est rond, j’ai l’expérience, on gravite autour, sans avancer. C’est par la peau du cou qu’il faut prendre son moral pour le remuer. C’est mon dermatologue qui m’a appris ça, un médecin à vue large. Il faut incarner les souffrances psychologiques, nos humeurs sont pleines de peau.
Mention spéciale pour l’humour.
L’onomastique du roman est finement choisie : le dépressif s’appelle
Fusain, son ami Larbeau, le proviseur Condillac et le beau-père ressemble à
Jean d’Ormesson.
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