John Williams, Stoner, traduit de l’américain par Anna
Gavalda, publication originale 1965.
Même si j’ai toujours du mal à
commencer un livre, j’ai particulièrement eu du mal avec celui-ci. J’ai
persisté, car je sentais bien quelque chose, mais du coup, je comprendrais les
lecteurs qui préfèrent abandonner.
De quoi s’agit-il ?
De la biographie d’une
universitaire imaginaire, William Stoner, issu d’une petite famille rurale
américaine qui devient professeur de littérature à l’université du Missouri. Sa
découverte de la littérature, sa thèse, son mariage peu heureux, son histoire
d’amour et sa lente disparition. À la fin, il ne reste que l’amour de la
littérature (je pense comprendre pour quelle raison on m’a offert ce livre).
Le roman retranscrit
remarquablement son époque : la campagne misérable, le sujet de thèse de
Stoner, l’essai de sa femme pour être moderne en raccourcissant ses cheveux et
ses robes… Stoner étudie les phénomènes par lesquels la pensée des Anciens a pu
être transmise par le Moyen Âge aux hommes de la Renaissance, car, non le Moyen
Âge n’est pas un gouffre noir et non, la Renaissance n’a pas tout inventé. Les
historiens de l’art et de la littérature du début XXe siècle sont en
effet nombreux à avoir étudié cette longue transmission (avec ou non perdition)
de la tradition latine (Panofsky, Warburg, Seznec). Déclenchement de la
Première Guerre mondiale, crise de 1929, Guerre d’Espagne, Seconde Guerre
mondiale… le moment est propice pour s’interroger sur les fondements d’une
civilisation et de la culture et sur les racines possibles de l’Occident. Je
trouve que le roman traduit de façon étonnamment juste ces inquiétudes au
travers de la vie de Stoner.
Université du Missouri. Image Wiki. |
Il s’agit bien évidemment d’un
hommage à la littérature, au savoir, au travail de la recherche, au goût de la
transmission, à travers ce portrait d’un homme avec ses faiblesses et ses
incapacités.
Mes difficultés au démarrage
s’expliquent par la tonalité générale d’un livre triste et habité par un
personnage qui semble indifférent à beaucoup d’aspects de la vie et qui
souhaite échapper au monde. L’écriture est aussi d’un calme volontiers
monotone. Il y a beaucoup d’imparfaits : est-ce dû à l’anglais ou au goût
de Gavalda pour Flaubert ? Je m’interroge. Cette prose correspond
indubitablement au héros et à sa vie.
Au début, il en avait été très
fier. Il l’avait tenu dans ses mains, avait caressé le papier ordinaire dans
lequel il était emballé puis l’avait feuilleté tranquillement. Il lui sembla
aussi fragile et vivant qu’un enfant. Il relut sa prose ainsi imprimée et fut
un peu surpris de la découvrir ni meilleure ni pire que dans son souvenir puis
finit par s’en lasser. Cependant, il ne put jamais s’empêcher d’y repenser sans
ressentir une pointe d’étonnement, voire d’incrédulité au regard de sa propre
témérité et de cette part de responsabilité qu’il avait alors accepté
d’assumer.
Pour l’avoir vécu, tout est
vrai !
Merci Eva pour m'avoir offert ce livre.
Ce n'est pas forcément un livre qui m'attirerait d'emblée, notamment si tu signales un aspect triste (cf. notre discussion de samedi sur l'ambiance des livres), mais l'aspect biographique et les thématiques traitées pourrait me faire changer d'avis !
RépondreSupprimer"Triste" c'est un peu réducteur en réalité. Le personnage choisit de se couper peu à peu de la vie, ou refuse de lutter dans sa vie, pour se tourner vers le plaisir de lire/ d'étudier / de transmettre / de comprendre. Cela peut aussi être senti comme très stimulant.
SupprimerJe crois que Lili est plus enthousiaste que moi par exemple.
Il m'avait été offert par une amie pour mon anniversaire et je l'ai lu il y a deux ou trois ans et j'ai été très agréablement surprise par l'histoire qui m'avait beaucoup plu. Après c'est vrai que c'est assez mélancolique.
RépondreSupprimerOui, on se laisse finalement prendre par l'histoire.
SupprimerJe l'ai lu lors de sa sortie. Je n'en garde que peu de souvenirs précis mais une impression de lecture plutôt persistante. L'étrange destinée de Stoner m'avais semblé à la fois enthousiasmante et désespérante. Bon, je rejoins les commentaires précédent : mélancolique, en somme !
RépondreSupprimerOui c'est un livre à la beauté tout à fait paradoxale, tout comme le parcours de ce personnage.
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