Albert Sánchez Piñol, La Peau froide, traduit du catalan par
Marianne Millon, 2002.
Un roman qui fait très peur.
Le narrateur arrive comme
climatologue sur une île minuscule de l’océan Antarctique. Il doit y passer un
an, en compagnie du gardien de phare. Mais dès la première nuit, il est
assailli par des monstres marins. À partir de ce moment, tout s’organise en vue
de la survie.
En réalité, tout s’avère beaucoup
plus compliqué. D’abord, on n’arrive pas sur cette île complètement par hasard.
Et puis l’autre homme, le gardien de phare, n’est pas vraiment un allié. Enfin
et surtout, les monstres sont à la fois proches des êtres humains et très
différents, ils terrifient et pourtant sont aussi des êtres sensibles. Notre
narrateur va passer par toutes les gammes d’émotions possibles.
A. Masson, La chute des corps, 1960, collection privée, M&M |
Ce roman m’a fait assez peur pour
que j’évite de le lire juste avant de dormir. Et pourtant je l’ai lu très
rapidement, pour savoir comment aller avancer le récit (en réalité, on se doute
franchement du dénouement) et pour ne plus sentir cet univers si oppressant me
coller à la peau. Il faut dire que la menace a la force de l’évidence :
pas de gémissement furtifs ou de bruits bizarres, mais l’assaut direct de
dizaines ou de centaines de créatures aux mains palmées chaque nuit ou presque.
À l’homme de succomber ou de devenir fou ou de faire face, même si les trois
positions sont compatibles. On a aussi la sensation que le narrateur, malgré
toute sa raison et ses résolutions, est pris dans un engrenage infernal,
au-delà de l’humanité, dont le lecteur sait qu’il ne parviendra pas à sortir.
Une très belle écriture propre
aux grands romans d’aventures ou aux méditation intérieures, aux récits de
voyage, mise au service d’un huis clos oppressant.
En l’observant, je n’ai pu éviter
un frissonnement : les yeux sont des miroirs d’un bleu prodigieux, plus
ronds qu’ovales. Un brillant d’ambre, un liquide oculaire avec une densité de
mercure. Je me suis vu dedans, en train de la regarder, c’est-à-dire me
regardant. J’ai failli abandonner. Quand on se voit reflété dans les yeux du
monstre, on ressent des vertiges ridicules mais puissants, que quelqu’un qui
ait partagé cette expérience ose m’accuser.
Bon pour le mois espagnol de Sharon.
Ca a l'air de faire sacrément peur, en effet.
RépondreSupprimerEn tout cas, moi, j'ai eu peur.
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