Jaume Cabré, Sa Seigneurie, traduit du catalan par Bernard Lesfargues, parution
originale 1991.
Une intrigue dans la Barcelone de
1799.
Que nous sommes loin de Confiteor… Nous voici en novembre et décembre
1799 à Barcelone, dominé par les Castillans (si vous avez suivi Victus), mais son élite ne pense que
sexe, pouvoir, sexe, argent, sexe. Une diva française est horriblement assassinée
et un pauvre poète bien vite emprisonné. C’est que le personnage principal, don
Rafel, Sa Seigneurie, régent civil de Barcelone, y a intérêt, mais l’on
comprendra progressivement pourquoi.
À coup sûr, des personnes présentes dans ce cercle, don Rafel était le plus envié, le plus haï et le plus craint parce qu’il était influent, inflexible et corrompu, trois qualités qui allaient normalement de pair avec la carrière de ceux qui, en ces années de grâce, tenaient le haut du pavé à Barcelone.
Le roman alterne les points de
vue entre le poète, son père, son ami militaire, le régent et sa femme et
quelques autres. Tous ces gens ne vivent pas dans le même monde. Entre ceux qui
projettent un opéra, ceux qui s’organisent en vue du Te Deum qui doit marquer le début du nouveau siècle – qui aura le
privilège de s’asseoir ? – ceux qui comptent les bonnes actions comme
autant de garanties pour le Purgatoire, ceux qui lorgnent sur leur voisine, etc. Il pleut beaucoup dans ce roman et
la boue envahit les rues, comme il domine déjà les cœurs des dirigeants, petits
et grands, de la ville.
C’est un roman gluant. Une bonne
lecture, mais triste et un peu déprimante. Un roman certainement bien documenté
sur l’époque, sur les rapports hiérarchiques entre les différentes autorités de
la ville, dont l’ambition est de piller les richesses, de nuire aux autres et
de se maintenir dans les honneurs en cultivant son réseau d’alliance. La
musique effectue de fugaces apparitions pour alléger le panorama d’ensemble. Qui
est ce Van Beethoven, ce Fanbetolen, pas grand-chose certainement ?
Mozart, Haydn sont là également.
Monastère de Pedralbes, un des lieux du roman. M&M |
Le texte est écrit dans une langue
caustique, triviale, peu amène avec ses personnages, qu’il moque en continue. C’est
ainsi que nous plongeons dans un monde où l’apparence prime : un riche
doit aimer les huîtres pour que l’on dise qu’il a les moyens de s’en payer, même
s’il préfère le navet.
Don Rafel tenait en l’air le
beignet qu’il venait de tremper.
- C’est à cause que, Votre Seigneurie
– le secrétaire soufflait et ouvrait des yeux grands comme des oranges –, Votre
Seigneurie… je viens de la rue et… on dit que… tout le monde dit, Votre
Seigneurie…
- Diantre, que dit tout le monde ?
- Qu’on a tué la cantatrice
gavache, Votre Seigneurie.
En hommage à l’importance de la
nouvelle, le beignet se partagea en deux et la partie enduite de chocolat
acheva sa course sur les chausses de Sa Seigneurie.
Bon pour le mois espagnol de Sharon.
Ce n'est pas vraiment un roman pour moi - pour le moment. J'ai besoin de lecture plus solaire, après un mois de mai compliqué professionnellement et un mois de juin qui le sera tout autant.
RépondreSupprimerJ'ai cru comprendre en effet que tout ne se passait pas bien au boulot pour toi et le livre est décidément trop gros et trop sombre dans ce cas, même si la vision historique me semble plutôt exacte.
Supprimer