Benoît Guillaume, De la fenêtre, le trompe-l’œil, 2006,
édité à la Cinquième couche.
Ce petit album au dessin délicat
raconte d’une façon poétique la transformation d’un quartier en ville. Un
quartier pauvre, habité par des gens venus d’un peu partout, avec des immeubles
branlants, des plafonds qui s’écaillent et des fourmis, où tout est à peu
détruit et reconstruit. Nous suivons le récit via deux personnages : Bertrand un agent immobilier, conquis
par le quartier, qui cache la misère avec des plantes et Marion, sa compagne,
qui se rend compte du processus inéluctable.
L’album est peu contaminé par la
problématique sociale, et choisit de s’inscrire dans une veine poétique et
mélancolique. Le dessin est en deux couleurs et superpose les traits noirs et
les traits verts, comme si les personnages pouvaient déjà être les fantômes
d’eux-mêmes. C’est assez perturbant. Ici, rien n’est simple. Bertrand est bien
sympathique, mais totalement naïf. Les plantes sont belles, mais dangereuses.
Les dessins sont des évocations destinées à tromper et à embellir… L’album
s’intéresse à ce moment intermédiaire, où les anciens immeubles sont
progressivement vidés de leurs habitants, où l’électricité est coupée, où les
commerces s’en vont, mais où les nouveaux édifices ne sont pas encore bâtis.
Cette étape de friche où la nature semble tout envahir, pour le pire et le
meilleur, un moment provisoire dans la ville.
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