Victor Hugo, Han d’Islande, 1823.
Un Hugo de jeunesse.
L’histoire débute en Norvège,
avec la découverte de trois cadavres. Puis, l’action se transporte dans une
forteresse où est emprisonné un prisonnier politique, le vieux Schumacker et
son adorable fille Éthel, et où apparaît le bel Ordener (mais on ne sait pas
qui il est). S’ensuit une histoire d’amour, avec une histoire de machination
politique et de complot, sur fond d’un pays en proie au diable et aux esprits.
Et Han d’Islande dans tout ça ? C’est un géant, un petit homme, un animal,
un démon, un homme aux ongles crochus, qui boit du sang humain, mais
parfaitement capable de se déguiser en moine et qui rôde et qui suit sa propre
voie.
Guldon Stayper, tu as sur ta tête grise cinquante-sept bonnes années, ce qui n’est jeunesse que pour le hibou. Guldon Stayper, notre camarade, j’aimerais mieux pour toi que les diamants de cette boucle fussent des grains de mil, si tu ne l’as pas acquise légitimement, aussi légitimement que le faisan royal acquiert la balle de plomb du mousquet.
C’est que nous sommes en Norvège
en 1699 et il y a quelque chose de pourri dans ce royaume. Ordener a tout en
effet du héros romantique, ne vivant que pour l’amour et ne désirant que la
mort, peu politique et peu stratège. Il s’en va sur une terre mystérieuse, avec
des montagnes, des ruines, des démons, des fées, des hommes vêtus de peaux de
bête. Han d’Islande représente le comble de l’homme sauvage, terrifiant,
échappant à toute loi, acteur imprévisible du récit. Hugo ne nous épargne
aucune scène sanglante ou dégoulinante, avec une certaine complaisance – on est
dans un autre monde.
Je n’ai pas trouvé ce roman
formidable. Comme dit ma sœur, il ne faut pas le lire trop vieux (je suis donc…).
Les héros, Ordener et Éthel, n’ont aucune épaisseur psychologique (j’ai même
trouvé Ordener assez niais, en tout cas il est totalement aveugle à ce qui
l’entoure) et il est difficile de trembler pour eux. Comme souvent, les
méchants comploteurs s’en sortent mieux. Et puis, Hugo a voulu tout
mettre : des citations intelligentes ou évocatrices en tête de chaque
chapitre, plein de noms propres exotiques pour faire atmosphère, toutes les
légendes de Norvège, des ruines et des cavernes (bon, il est jeune, il a testé
tous les éclairages du théâtre en une seule soirée et c’est un peu trop).
Les traits du petit homme, que la
lumière faisait vivement ressortir, avaient quelque chose d’extraordinairement
sauvage. Sa barbe était rousse et touffue, et son front, caché sous un bonnet
de peau d’élan, paraissait hérissé de cheveux de même couleur ; sa bouche
était large, ses lèvres épaisses, ses dents blanches, aiguës et séparées ;
son nez, recourbé comme le bec de l’aigle ; et son œil gris bleu,
extrêmement mobile, lançait sur Spiagudry un regard oblique, où la férocité du
tigre n’était tempérée que par la malice du singe. Ce personnage singulier
était armé d’un large sabre, d’un poignard sans fourreau, et d’une hache à
tranchant de pierre, sur le long manche de laquelle il était appuyé ; ses
mains étaient couvertes de gros gants de peau de renard bleu.
Ta soeur a raison ! C'est le genre de livre qui doit te faire une peur bleue si tu le lis quand tu es ado ! Là, c'est difficile à prendre au sérieux ! Et je suis d'accord avec toi : Ordener n'a pas l'air très intelligent; même quand le danger est évident, il y fonce tête baissée.
RépondreSupprimerN'empêche qu'écrire un roman pareil à 18 ans est une prouesse.
Oui on n'y croit pas tellement. Moi ce qui me va, c'est que ça finit bien, c'est un truc que j'apprécie.
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