La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



mardi 28 juillet 2020

La Suisse peut s’enorgueillir d’être la patrie de celui qui inventé la limnologie, la science des lacs.

Pierre-Yves Frei et Sandra Marongiu, Un tsunami sur le Léman, Tauredunum 563, publié en 2019 par les PPUR.

Le titre vous intrigue ? Et oui, le lac Léman connaît ses tsunamis.
Nous sommes ici dans l’histoire, et pas dans le roman !
C’est une équipe de géologues qui a levé le lièvre en découvrant au fond du lac des niveaux de sédiments tout à fait anormaux, portant trace d’une très forte perturbation. Analyse de l’épaisseur, du volume, estimation de la date, modélisation, etc. et surtout mise en relation avec quelques lignes contenues dans deux manuscrits très anciens, racontant comment une montagne s’est écroulée et comment une vague géante a submergé les rives du lac. Avant l’intervention des géologues, on ne croyait pas trop à ce racontar…
J’avais entendu parler de l’histoire sur France Culture et j’ai pris grand plaisir à me lecture. Le sujet a donné lieu à divers articles spécialisés dans telle ou telle revue, mais le livre adopte le grand angle, ce qui en fait toute sa réussite. Nous avons une description du travail des géologues, une histoire géologique de la constitution des Alpes et du lac Léman, une évocation des peuples vivant dans le secteur en 563 (Romains, Allobroges, Burgondes et autres), ainsi que des traces archéologiques qu’ils ont laissées, un lien avec les autres tsunamis et avec les tremblements de terre qu’il y a parfois dans les Alpes et une conclusion sur l’utilité de ce genre de travail non seulement pour comprendre le passé, mais aussi pour se préparer à d’autres catastrophes : d’autres vagues géantes sont possibles et le risque doit être identifié et les populations préparées à évacuer. La démarche est totalement transdisciplinaire : sans les géologues on ne prendrait pas au sérieux le récit d’un ecclésiastique du VIe siècle, mais sans ce manuscrit on ne saurait pas d’où viennent les sédiments qui ne sont pas à leur place. Un modèle de recherche, qui plaide pour une culture vaste et diversifiée des citoyens et des chercheurs, et qui invite à ne pas oublier les catastrophes du passé.
C’est donc un livre qui part d’un sujet très précis, mais qui s’inscrit pleinement dans la culture générale. Il explique simplement une datation au carbone 14 ou une carotte sédimentaire, donne les différentes hypothèses sur le lieu et les causes de l’éboulement, la recherche d’autres tsunamis que celui de 563, voire le regard porté sur d’autres lacs alpins. On a les scénarios des conséquences d’une vague semblable sur la ville de Genève d’aujourd’hui, sachant que les rives du lac sont bien plus peuplées que dans les siècles passés.
Très riche !
Aquarelle de David Alois Schmid. Une catastrophe similaire survenue en 1806
sur le lac de Lauerz. Copie du livre.
Merci Babelio et PPUR pour la lecture !

Si vous êtes curieux d'en savoir plus, vous pouvez écouter cette émission.


5 commentaires:

keisha a dit…

Allons bon, j'en apprends tous les jours (le pire, c'est que ça m'intéresse, cette histoire là)

nathalie a dit…

Dans mon immense bonté, je pourrais t'envoyer le livre. Les seules longueurs sont liées à mon absence totale de connaissance de la géographie suisse, mais il est très bien fichu !

keisha a dit…

non non, merci tu es gentille, mais maintenant les livres baladeurs, j'évite (et j'ai déjà eu quelques livres égarés)(surtout que je connais peu la suisse, genre vallées et montagnes!)

miriam a dit…

la limnologie cela m'intéresse bien! j'ai fait un DEA de sédimentologie et une thèse de géologie en méditerranée orientale. je vais chercher ce livre

nathalie a dit…

Oh je ne savais pas du tout ! En effet, cela devrait t'intéresser dans ce cas.