J’ai décidé de consacrer une série de billets aux peintres impressionnistes. Ils sont très connus, on les trouve dans tous les musées et ce ne sera donc pas très original. Sauf qu’à force de les connaître, on risque de passer devant les peintures sans en voir toute la beauté. Et puis, j’ai pleiiiiin de photos à vous montrer.
Bazille, Portrait de Renoir, 1868 Fabre |
Ce sera, comme d’habitude, assez arbitraire.
L’impressionnisme, c’est la peinture moderne, celle de la vie contemporaine, celle du plein air, avec une touche rapide, mettant en valeur la couleur et la lumière, ce qui n’empêche pas, loin de là, les études, les croquis, les préparations et la connaissance des maîtres anciens. Les sujets sont nouveaux, la technique est également nouvelle.
C’est une peinture qui apparaît alors que le champ artistique se transforme radicalement au cours du XIXe siècle. Jusqu’alors, les artistes travaillaient pour les rois et les princes, les grandes institutions religieuses, les très riches aristocrates. Depuis le XVIIIe siècle, la clientèle « privée » se fait de plus en plus nombreuse. Alors qu’auparavant, on commandait un décor pour son hôtel particulier ou une chapelle, voilà que les artistes produisent des œuvres sans savoir où elles seront accrochées, ni par qui elles seront acquises. C’est une grande transformation pour le travail des artistes ! Le mouvement ne fait que s’accentuer au cours du XIXe siècle, ce qui explique l’essor d’une nouvelle profession : galeriste. C’est lui qui conseille le peintre sur ce qu’il devrait faire pour progresser et pour rencontrer le succès, qui choisit de soutenir tel ou tel artiste et de l’accrocher, qui conseille les potentiels acheteurs, notamment les collectionneurs, qui organise des expositions et des tournées pour faire connaître ses jeunes talents, qui invite la presse dans sa galerie. Les artistes impressionnistes sont inséparables de quelques grands galeristes, comme Paul Durand-Ruel.
Vous avez certainement entendu parler du Salon (et du Salon des Refusés) de peinture. C’est la grande messe où les artistes contemporains peuvent montrer leurs œuvres récentes, espérer une commande de l’État, espérer aussi que l’État achète une œuvre, ou que des particuliers les achètent, espérer aussi une critique positive, bref se faire remarquer. Il faut pour vivre absolument faire un coup d’éclat au Salon ! C’est bien pourquoi la notion même d’avant-garde apparaît (elle est inséparable de la question de l’opinion publique).
Caillebotte, Rue de Paris temps de pluie, 1877 Marmottan |
À noter que tous les éléments de cette vie artistique (collectionneurs particuliers, acheteurs non aristocratiques, expositions et Salon, critiques d’art) ont été forgés au cours du XVIIIe siècle (c’est le XVIIIe qui a tout fait, cherchez pas), mais qu’ils se sont en quelque sorte assemblés de la façon que nous connaissons au cours du XIXe siècle.
Évidemment, il faut aussi ajouter la peinture en tube qui permet de peindre en plein air, les chemins de fer qui permettent d’aller sur la côte normande, les transformations de la vie sociale (le canotage, les brasseries sur les boulevards, le train, le goût des urbains pour la campagne, etc.), sans oublier la montée en puissance de la bourgeoisie. Tout un monde !
Signac, Nature morte, 1883 Berlin ancienne galerie nationale |
Je ne vous ferai pas un cours sur l’impressionnisme (il y a Wikipedia pour cela), mais je vous présenterai quelques œuvres de quelques peintres. Il s’agira des noms les plus connus, ceux qui hantent les musées, surtout des artistes français. Il en existe bien d’autres, mais je n’ai pas tout photographié. Et puis, il y aura un billet thématique ! Il est d’autant plus difficile de délimiter le corpus que l’impressionnisme a essaimé dans le monde entier, que des peintres ont continué à s’inscrire dans cette esthétique jusque dans les années 1930, qu’il y a du néo-impressionnisme et du postimpressionnisme et du pointillisme et l’école de Pont-Aven, des ancêtres dans les peintres paysagistes et des descendants dans les fauves, etc. L’impressionnisme, c’est aussi un rapport à la lumière et à la couleur, au choix des sujets, à la façon de regarder le paysage, et cela transcende les strictes expositions impressionnistes.
G. Morren, À l'Harmonie jardin public Anvers, 1891 Orsay |
Pour en revenir au début du billet, à cette peinture qui fut si révolutionnaire et qui est aujourd’hui si commune, je cite Proust :
D’ailleurs, chaque fois que quelqu’un regarde les choses d’une façon un peu nouvelle, les quatre quarts des gens ne voient goutte à ce qu’il leur montre. Il faut au moins quarante ans pour qu’ils arrivent à distinguer. (…) Mais enfin l’autre jour j’ai été avec la grande-duchesse au Louvre, nous avons passé devant l’Olympia de Manet. Maintenant, personne ne s’en étonne plus. Ça a l’air d’une chose d’Ingres !
Cette peinture, si scandaleuse à son apparition, est aujourd’hui bien endormie. Je vous propose donc de la regarder à nouveau.
Zorn, Femme se déshabillant, 1893 privé |
ADDENDUM FRONT : La cicatrice en T inversé est rouge vif, mais elle devrait s'effacer progressivement. Plus de pansement, mais des séances de kiné pour masser la cicatrice (elle est plus dorlotée que moi, la vie est injuste). De possibles reprises à l'automne pour ajuster tout cela, mais que de bonnes nouvelles !
Merci, car à part le Caillebotte, je ne connaissais pas les autres tableaux. J'attends la suite... et puis, si Proust s'en mêle, c'est la classe!
RépondreSupprimerLe front : bon, on attaque la dernière ligne?
Pour le front, j'ai fait ma 1e séance de kiné. Je pense que la dernière ligne ne sera franchie que cet automne. Il faut que j'emmagasine des forces d'ici là !
SupprimerJe trouve que la citation de Proust est très parlante.
Ah quelle belle idée je vais venir te lire sois en certaine
RépondreSupprimerest ce que tu connais le blog de Wodka qui fait régulièrement des billets sur l'art très fournis, très documentés, bref passionnants
http://wodka.over-blog.com
Je crois que tu me l’as déjà signalé mais je ne le lis pas régulièrement. Mais tu as raison, je vais y regarder !
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