La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



mardi 19 avril 2022

Le sang de l’arbre n’est pas spectaculaire, il ressemble à de l’eau.

 Peter Wohlleben, La Vie secrète des arbres, traduit de l’allemand par Corinne Tresca, parution originale 2015, édité en France par les Arènes.

 

Enfin lu ce grand succès arboricole !

Dans cet essai, l’auteur part de son expérience de forestier, d’abord en exploitation standard, puis en exploitation plus durable, pour relater ce qu’il a appris des arbres : comment ils communiquent entre eux, comment ils s’entraident, comment ils se concurrencent, la vie avec les champignons et les insectes, leur longue vie quoi.

C’est un livre très intéressant qui nous apprend des tas de choses ou plutôt, pour ce qui me concernent, décrit avec plus de précision des choses dont on pouvait se douter (18 ans de vie dans les bois normands avant d’aborder à Marseille). Je connaissais le rôle des champignons (grâce à un vieux Mooc), mais Wohlleben donne plusieurs exemples concrets de l’action de ces êtres (tout à la fois minuscules et gigantesques).


Le champignon non seulement pénètre et enveloppe les racines, mais il développe son réseau de filaments dans le sol alentour. Il s’étend bien au-delà des racines de son hôte pour se mêler aux racines des autres arbres et il se connecte avec les champignons partenaires et les racines de chaque nouvel arbre rencontré. Il en résulte un vaste réseau au sein duquel les échanges aussi bien de nutriments que d’informations, par exemple sur l’imminence d’une attaque d’insectes, vont bon train.


Pour ce qui est strictement du propos scientifique, je suis souvent restée sur ma faim : j’aurais préféré qu’il présente de façon un peu plus approfondie certains travaux qu’il évoque simplement d’un ton très général. J’avoue avoir été troublée par ses propos sur le lierre, totalement contradictoire avec ceux de La Hulotte. Pour moi, il ne vulgarise pas assez ses connaissances et se contente d’effleurer le terrain scientifique en s’appuyant beaucoup sur son expérience ou sur son ressenti. Les chapitres sont assez inégaux : j’apprécie quand il détaille les qualités de chaque espèce d’arbre et leur capacité à occuper tel terrain plutôt que tel autre, les interactions avec les champignons, insectes, oiseaux.


Une grande forêt profonde est un immense supermarché. Tous les délices y sont en rayons, du moins du point de vue des animaux, des champignons ou des bactéries. Un seul arbre présente des millions de calories sous forme de sucre, cellulose, lignine et glucides.


Ce qui importe est en réalité davantage l’atmosphère : l’attention qu’il faut porter sérieusement aux arbres, non de notre point de vue, mais en s’efforçant d’adopter le point de vue des arbres et des êtres qui l’environnent. Ça a l’air d’une évidence dit comme ça, mais on sait bien que…

Je retiens notamment cette idée de longue durée : un arbre vit très longtemps et ses réactions sont lentes – du moins selon notre échelle. On ne peut donc juger de l’impact d’une action que sur plusieurs années, ce qui est assez compliqué à concevoir pour nous. À cet égard, je trouve que Tolkien, avec ses Ent, a réussi à donner une bonne représentation du phénomène.

Si l’on manque d’expérience scientifique sur les arbres, c’est également sans doute à cause de notre manque d’attention et d’intérêt pour un truc qui nous semble très évident. Nous connaissons bien mal les arbres et ce livre a le mérite de nous inviter à ajouter de la complexité au monde : un arbre n’est pas simplement du bois et des feuilles, il y a aussi de l’eau et des glucides, ce qui explique l’intérêt de tous les animaux et de toutes les plantes à se presser autour. L’auteur invite également à considérer l’humidité et la température, au sol et à plusieurs mètres de hauteur.

L’écriture est très ennuyeuse.

Je crois que je vais continuer à regarder les documentaires scientifiques d’Arte !

 

L’augmentation annuelle de la production de biomasse, notamment de bois, atteste de la bonne santé des peuplements denses. Quand ils vivent en groupe serré, la répartition des substances nutritives et de l’eau entre tous les individus est optimale, si bien que chaque arbre parvient au meilleur développement possible. Si l’on « aide » ici et là un individu à se débarrasser de sa supposée concurrence, les arbres restants deviennent des solitaires.

 

Les avis de Et si on bouquinait et de Dominique.

Photos prises à l'arboretum d'Harcourt (des plantations pas du tout locales)


6 commentaires:

keisha a dit…

Aie, je l'avais emprunté, puis pas le temps, et maintenant tu as l'air déçue. Tu connais Stefano Mancuso?

Estelle a dit…

Sur le lierre (et les arbres aussi), quelques réponses dans cette émission :

https://www.franceinter.fr/emissions/la-terre-au-carre/la-terre-au-carre-du-lundi-11-avril-2022

Dominique a dit…

le premier de ses livres m'a vraiment passionné puis ensuite je l'ai trouvé rapide et redondant un peu comme un écrivain qui surf sur la vague d'un succès dommage

nathalie a dit…

Non je ne connais pas. Je vois que c'est un biologiste qui a publié sur l'intelligence des plantes et ce genre de choses. Tu as raison, cela pourrait me plaire.
Je suis déçue parce que c'est de la vulgarisation basse qualité et qu'il doit exister tellement mieux, aussi accessible et plus intéressant.

nathalie a dit…

Ah merci, c'est tout récent, je vais aller écouter ça.

nathalie a dit…

Je comprends ce que tu veux dire. En effet, c'est dommage.