Suite des nouvelles d’Isaac Bashevis Singer.
La Couronne de plumes et autres nouvelles, Paris, Stock, 2009.
Traduit de l’anglais (américain) et du yiddish.
Ah oui, je fais des textes longs, trop longs selon les normes recommandées quand on crée un blog, mais ceux qui n'aiment pas lire n'ont pas grand-chose à faire ici, n'est-ce pas ? Et j'aime donner des extraits...
Reprenons notre exploration de l'univers de Singer. Car tout ce petit monde (du moins ce qui en subsiste) se retrouve, presque intact, à New York : les rabbins, les imposteurs, les mères juives, les revues yiddish qui sont de moins en moins lues, les couples à trois, les fantômes, les esprits de tous ceux qui sont morts. Un écrivain fait connaissance d’une lectrice passionnée et folle, un autre est marié à une femme à barbe, une femme disparaît sur la 5e avenue, aspirée par un démon.
Un mariage à Brownsville. Un médecin se rend à une noce, un soir où la neige recouvre la ville ; la chaleur de la salle, l’alcool, la ronde infernale d’une danse et le voilà en train de tournoyer au milieu de ceux de son village.
"Mon père ? Il a été tué. Ils ont tous été tués. Je suis le seul survivant de la famille." "Berish, le fils de Feivish ? Il est mort de faim en Russie - on l'avait envoyé au Kazakhstan. Sa femme ? Elle est en Israël. Elle s'est remariée avec un Lituanien." "Sorele ? Fusillée avec ses enfants. " "Yentl ? Elle est ici, au mariage. Je viens de la voir, il y a à peine un instant. La voilà, elle danse avec ce grand type." "Abraham Zilberstein ? On l'a brûlé dans la synagogue, avec vingt autres. Un tas de charbon de bois, c'est tout ce qui est resté, du charbon et des cendres. "Yosele Budnik ? Il est mort il y a des années. Vous parlez sans doute de Yekele Budnik. Il a un épicerie fine ici même, à Brownsville. Il a épousé une veuve dont le mari avait fait fortune dans l'immobilier."
Ah oui, l'Holocauste n'est pas encore une vache sacrée et sans que l'auteur en parle réellement, elle est un événement familier et brutal par où tout le monde est passé. Les morts et les vivants dansent ensemble sur les ruines d'un monde qui se défait et où la langue yiddish devient de plus en rare.
La cafétéria.
Bien que j’aie atteint le point où une bonne part de mes gains s’en va en impôts, j’ai gardé l’habitude de prendre mes repas dans des cafétérias quand je suis seul. J’aime avoir un plateau, un couteau en fer-blanc, une fourchette, une cuillère, une serviette en papier et choisir au comptoir mes plats préférés. En outre, je rencontre là-bas les landsleit de Pologne et toutes sortes d’écrivains débutants et de lecteurs qui savent le yiddish. Dès que je m’installe à une table, ils viennent vers moi, me saluent, « bonjour, Aaron ! » et nous parlons de l’Holocauste, de littérature yiddish, de l’État d’Israël et souvent de gens qui mangeaient du gâteau de riz et des pruneaux la dernière fois que j’étais là et qui sont morts depuis.
Un très bon article pour se documenter sur la littérature yiddish.
Je viens de chez Pascale, bienvenue sur la blogosphère. J'ai lu plusieurs romans d'Isaac Bashevis Singer il y a longtemps, toujours avec bonheur. Je ne crois pas avoir lu celui-ci, je le note, je relirai volontiers cet auteur.
RépondreSupprimerLe nom du traducteur ou de la traductrice ne serait pas superflu.
RépondreSupprimertout comme le vôtre, cher (chère) anonyme. Traductions de l'anglais par Marie-Pierre Bay, de Jacqueline Chnéour, de Paul Giniewski.
RépondreSupprimerComplément d'informations.
RépondreSupprimerJe pense que les traducteurs peuvent à bon droit se plaindre auprès de Stock qui n'indique pas les noms des traducteurs sur la page de garde, il a fallu que j'aille les chercher à chaque ouverture de recueil, ce qui n'est pas très pratique. Les différentes préfaces indiquent que Singer a traduit lui-même ses textes du yiddish à l'anglais (avec l'aide de ses traducteurs), ce qui explique que toutes les nouvelles soient traduites de l'anglais.
Les éditeurs ne sont pas encore tout à fait au point avec les traducteurs. Dans l'ouvrage de Döblin sur lequel j'ai aussi écrit un billet, il est indiqué sur la couverture "nouvelle traduction" sans nom de traducteur comme si le fait d'être nouveau était suffisant (version remastérisée, d'après une nouvelle copie, dirait-on pour d'autres supports).