La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



lundi 7 février 2011

Et maintenant il va mettre Franz dans le bain. Pourquoi ça ne serait pas lui après tout.

Second épisode à propos de Döblin et de Berlin Alexanderplatz



La langue, la langue de Döblin. Elle est vivante, mouvante, orale et savante, manie les allusions mythologiques et symboliques (Job, Adam et Ève), cite les journaux. Les faits divers (un cambriolage dans une cour d’immeuble, un meurtre passionnel, une dispute dans le bus) qui donnent le pouls de la ville, qui disent les passions qui agitent les hommes et la pauvreté, la misère humaine, l’alcool. La langue est insaisissable, riche et foisonnante. Les chansons qui se fredonnent en marchant dans le froid pour se tenir chaud au moral. J'ai lu la dernière traduction française, apparemment la précédente avait lissé tous les effets expressifs, ce qui, effectivement, devait être dommage.




Un extrait culte, la description des abattoirs qui s'étend sur plusieurs pages.
D'abord quelques lignes sur le cours de la viande en marks.
La superficie des bâtiments. Le nombre d’employés.
L’auteur s’adresse maintenant aux cochons :

Un jeune homme au teint pâle, les cheveux blonds collés, a un cigare dans la bouche. Voyez un peu, c’est le dernier homme qui s’occupera de vous ! Ne pensez pas de mal de lui, il ne fait que remplir son office. Il a une affaire administrative à régler avec vous. Il ne porte que des bottes, un pantalon, une chemise et des bretelles, les bottes lui remontent au-dessus du genou. C’est son appareil officiel. Il ôte le cigare de sa bouche, le dépose dans un compartiment le long du mur, prend dans un coin une longue hache. C’est l’emblème de sa dignité officielle, de sa prééminence sur vous, comme la plaque du policier. Il va vous la montrer tout de suite. C’est une longue tige de bois que le jeune homme soulève à hauteur d’épaule au-dessus des petits cochons couinants tout en bas, ils fouissent tranquillement, furètent et grognent.

Je vous épargne la description de la mort de la vache et du petit veau, elle n’est pas du tout cruelle ou sadique, juste technique et froide et c'est assez terrible.
Il existe un site en français sur Döblin pour en savoir plus.

2 commentaires:

Alex Mot-à-Mots a dit…

Un roman très dense, je comprends que tu en ais fait 2 articles.

nathalie a dit…

Enchantée Alex... oui, on doit même pouvoir en faire un 3e et plus encore, j'ai vraiment beaucoup aimé ce livre.