La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



jeudi 8 février 2024

L’Uruguay n’est pas un fleuve, c’est un ciel bleu qui passe.

 


Luis Sepúlveda (texte) et Daniel Mordzinski (photographies), Dernières nouvelles du Sud, parution originale 2011, traduit de l’espagnol par Bertille Hausberg.

 

Sur les routes de Patagonie. Un livre pour prendre l’air et la poussière.

Deux compères descendent la Patagonie du nord au sud en 1996. Sepúlveda a traînassé et a rédigé le texte 15 ans plus tard et le voilà.

Le voyage n’est pas raconté de A à Z, mais en suivant quelques étapes. Des villes ou des lieux au milieu de nulle part, prétexte à s’entretenir avec les habitants, chez eux, en toute simplicité. Il est beaucoup question des Mapuches et de la spoliation des terres. Les Européens sont à la fois ceux qui ont colonisé un monde et l’ont détruit, ce sont aussi d’anciens nazis, mais ce sont eux aussi qui ont créé une société originale, avec des cultures et des cuisines venues de partout. On est loin de Buenos Aires et de ceux qui s’achètent des milliers d’hectares, et pourtant on les croise.




Le vent courbait les gigantesques peupliers entourant le cimetière et l’immense coupole formée par leur feuillage protégeait la paix de ceux qui reposaient là, des gens arrivés un jour dans le sud du monde, pleins de rêves, d’ambition, d’espoirs, de projets, d’amours, de haines, ces matériaux élémentaires qui façonnent notre bref passage sur terre.


Le texte est un peu lent à démarrer, Sepúlveda se plaisant un peu trop à mon goût à se présenter en recalé de la modernité. Une fois que l’on est dans la voiture, ouf, c’est bon. Les personnages rencontrés sont des hommes et de très vieilles femmes, il y a beaucoup de bière et de viande, mais malgré tout, j’ai apprécié cette échappée au bout du monde.

Il y a la rencontre improbable avec un luthier, avec l’arrière-petit-fils de Davy Crockett, avec des gens qui parlent de Butch Cassidy et un cinéma au bord du détroit de Magellan.

 

Avec ou sans nuages, le ciel patagon semble toujours bas, il cesse d’être l’immense voûte céleste des autres latitudes et écrase le voyageur. Au cours d’un précédent voyage, alors que je chevauchais aux alentours de Río Mayo, j’ai croisé un gaucho venant en sens inverse. À vrai dire, on ne peut pas parler de rencontrer car le cavalier dormait, mais les chevaux se sont arrêtés face à face pour nous rappeler les coutumes humaines. L’immobilité l’a réveillé en sursaut, il a ouvert les yeux et m’a salué :

- Comment ça va, l’ami ?

- Bien et vous ?

- Comme vous voyez, entre le ciel et la terre, m’a-t-il dit avant d’éperonner son cheval.

 

À El Maitén, comme dans tant d’autres agglomérations des lointaines provinces du Sud, les gens venaient régulièrement s’asseoir dans les gares pour regarder passer le train. Cette habitude corroborait l’existence du temps et de l’univers : si le train passait c’est qu’il venait d’un endroit pour se rendre dans un autre.


La Patagonie sur le blog :

Jorge González, Chère Patagonie un album de BD

Eduardo Fernando Varela, Patagonie route 203, un roman argentin


On cherche toujours à s’accaparer les terres de Patagonie, comme le montre malheureusement l’actualité.

 

Ce billet constitue une première participation al mes della america latina de Ingannmic.






10 commentaires:

  1. J'ai pas mal lu sur la Patagonie, mais pas toujours de billet. (William henry Hudson)

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  2. @Eimelle : beaucoup de terre plate à l'infini, de chevaux et de moutons !

    @Keisha : ah le fameux Hudson !

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  3. Sépulvéda je n'ai pas tout lu mais ce que j'ai lu m'a beaucoup plu

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  4. Un récit de voyage, je crois que c'est une première, toutes éditions confondues, pour le mois latino !
    Cela aurait aussi fait une belle participation aux minorités ethniques (le mois latino s'y prête "naturellement", j'ai rencontré des minorités ethniques quasiment à chaque lecture).

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  5. @Dominique : j'ai lu des nouvelles et j'ai assez envie de relire Le Vieux qui lisait des romans d'amour, c'est une réussite.

    @Ingannmic : ah oui les Mapuches devenus minoritaires chez eux.

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  6. ça me donne envie de lire des récits de voyage, tiens ! De Sépulveda, je n'ai lu que son roman son beau roamn "Le vieux qui lisait des romans d'amour"

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  7. @JeLisJeBlogue Je crois que le roman que je cite donne encore plus envie de prendre la route. Mais oui, le ciel, l’espace…

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  8. Je connaissais pas celui-là.
    Sinon sur la Patagonie il y a aussi Mempo Giardinelli ”Fin de roman en Patagonie”.

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  9. @Carmen merci je vais regarder ce titre !

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