Eduardo Fernando Varela, Patagonie route 203, parution originale 2019, traduit de l’argentin par François Gaudry, édité en France par Métailié.
Une longue errance au milieu de nulle part.
Le héros, Parker, conduit un camion, chargeant et déchargeant d’un port à l’autre. Il vit aussi dans son camion et cette errance sans fin semble lui convenir. Un jour, il croise le chemin d’une fête foraine et d’une femme magnifique nommée Maytén.
Parker comprit qu’elle était vraiment de la région, c’est-à-dire d’un point quelconque dans un rayon de deux ou trois mille kilomètres.
C’est une lecture envoutante.
D’abord, il y a le décor. La route au milieu de la steppe et des herbes, les barbelés et de drôles d’animaux, des stations-services miteuses, des villages aux noms grotesques qui se ressemblent tous. Et surtout le vent. Le vent qui souffle le matin dans un sens, l’après-midi dans un autre. Si vous voulez avancer, il faut apprendre à le maîtriser. Les personnages se perdent et se retrouvent, se croisant à un carrefour et disparaissant dans un nuage de poussière.
Prenez la nationale tout droit, après-demain tournez à gauche, lundi vous tournez à droite et vous continuez jusqu’à l’Atlantique. C’est le seul océan, vous ne pouvez pas vous perdre.
Masques Yamana (Terre de feu vers 1910) NY Musée des Indiens américains |
Il y a aussi le grotesque. L’onomastique absurdement désolée. La fête foraine et son train fantôme où l’on se donne rendez-vous, le mari jaloux qui circule à moto avec la faux de la Mort, le catch, un vent de cendres et de poussières et des pluies dévastatrices, les néo-nazis paumés et une fête annuelle du sous-marin dans le Ravin des Singes. C’est un univers absurde où les repères habituels s’écroulent.
Et c’est une belle histoire d’amour entre Parker et Maytén. Parker est un grognon un peu pénible à supporter, mais parfaitement adapté à cet univers perdu.
Cela n’empêche pas la poésie, entre tous ces êtres un peu perdus.
Quand cette sensation de vide l’enveloppait, il avait l’impression que les roues décollaient doucement de l’asphalte et qu’il s’élevait au-dessus des reliefs ocrés du désert patagonien. L’air devenait plus dense, le poids se dissolvait dans l’atmosphère et la route n’était plus qu’une ligne incertaine qui se perdait au loin.
Troisième participation au mois latino-américain d'Ingannmic.
La Patagonie était déjà présente sur le blog grâce à cette BD : Chère Patagonie de Jorge González.
j'ai beaucoup lu un temps sur la Patagonie mais cela m'a un peu passé
RépondreSupprimerPour le coup, je pense que celui-ci te plairait !
SupprimerTiens oui, le mois latino se termine, bah, il faudrait noter pour l'année prochaine, je viens de réaliser que j'avais un Padura non lu!
RépondreSupprimerMoi aussi j'ai un Padura non lu. Encore un an pour s'y mettre !
SupprimerCe n'est pas tous les jours que tu utilises les mots "lecture envoutante". Dommage que mes bibliothèques ici ne l'aient pas, dans aucune langue.
RépondreSupprimerIl y a une atmosphère, on se laisse prendre.
SupprimerDe ton avis totalement. Un fameux voyage.
RépondreSupprimerOn ne sait pas très bien vers où, mais c'est un voyage !
SupprimerUn titre qui fait l'unanimité, et qui a priori a en effet tout pour me plaire, oui...
RépondreSupprimerAllez, monte dans le camion et prends la route !
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