La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



vendredi 21 janvier 2011

"Le peuple de Paris le contemplait et l’enviait."

Maupassant, Bel-Ami, première édition 1885.

Beaucoup d’entre vous ont vraisemblablement lu ce classique, mais, moi, je l’ai relu récemment. Pas une ride sur ce roman, tant pour le parcours du héros, tant pour l’écriture.
     Georges Duroy est à Paris et a de l’ambition. Il réussira, grâce aux femmes et à son esprit. Il entre à la Vie française comme journaliste, se frotte aux manœuvres politiques, aux délits d’initiés, à la rumeur malveillante. Se fait appeler Du Roy puis baron Du Roy de Cantel mais garde ce surnom de Bel-Ami, donné par une enfant. Il choisit ses maîtresses avec soin. Son épouse lui écrit ses meilleurs papiers, jusqu’au jour où il découvre qu’une autre femme lui permettrait d’accéder au rang de député. Il n’a pas épousé la bonne… Qu’à cela ne tienne ! Au XIXe siècle, les femmes ne peuvent hériter sans l’accord de leur époux, il y a moyen d’en divorcer au moment opportun et de forcer un mariage adéquat. Rien ne peut arrêter l’irrésistible ascension de Bel-Ami.
Et l’écriture précise de Maupassant, rapide, pleine de détails significatifs, sans arrêt sur les descriptions ou sur les émois affectifs. L’action se déroule, elle aussi irrésistible.

Il se dit : « Il faut que je gagne dix heures et je prendrai mon bock à l’Américain. Nom d’un chien ! que j’ai soif tout de même ! » Et il regardait tous ces hommes attablés et buvant, tous ces hommes qui pouvaient se désaltérer tant qu’il leur plaisait. Il allait, passant devant les cafés d’un air crâne et gaillard, et il jugeait d’un coup d’œil, à la mine, à l’habit, ce que chaque consommateur devait porter d’argent sur lui. Et une colère l’envahissait contre ces gens assis et tranquilles. En fouillant leurs poches, on trouverait de l’or, de la monnaie blanche et des sous. En moyenne, chacun devait au moins deux louis ; ils étaient bien une centaine par café ; cent fois deux louis font quatre mille francs ! Il murmurait : « Les cochons ! » tout en se dandinant avec grâce. S’il avait pu en tenir un au coin d’une rue, dans l’ombre bien noire, il lui aurait tordu le cou, ma foi, sans scrupule, comme il faisait aux volailles des paysans, aux jours de grandes manœuvres.

Quatre mois après sa parution, il en était à sa 37e édition… tous les textes sont ici.

4 commentaires:

Dominique a dit…

Aimant beaucoup Maupassant et n'ayant jamais lu Bel ami je l'ai il y a quelques mois "écouté" en livre audio avec un infini plaisir
je sais que je le lirai un jour ou l'autre car c'est vraiment excellent, un vrai classique au sens d'Italo Calvino

nathalie a dit…

Oui, c'est frappant comme il peut se lire ou se relire à tous moments, peu d'auteurs ont cette qualité (et ça n'a rien à voir avec le talent).

Marc a dit…

Un de mes romans préférés de Maupassant, qui est lui-même un de mes écrivains préférés! A relire sans cesse... Même si j'avais déjà ses oeuvres, je les ai récemment rachetées en Pochothèque (collection classiques modernes), on peut également trouver ses articles de journaux...

nathalie a dit…

et les éditions des Falaises éditent plein de textes peu connus aussi !