La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



mercredi 19 janvier 2011

Soudain il fut frappé par le fait qu’on ne voyait même pas d’oiseaux.

Thomas Glavinic, Le Travail de la nuit, traduit de l’autrichien par Bernard Lortholary (2006), Paris, Flammarion, 2007.

Un roman étrange et inquiétant dont le propos est extrêmement simple : Jonas vit à Vienne, en Autriche, et ce 4 juillet, il est un peu étonné de constater que ni internet, ni le téléphone, ni la télévision ne fonctionnent. Le journal n’a pas été distribué. « Mais sacré nom d’un chien », se dit-il. Il sort pour attendre le bus et se rendre à son travail, comme tous les jours. Mais au bout d’un moment, il réalise qu’il est tout seul dans la rue et qu’aucun véhicule ne roule. Il prend sa voiture pour aller dans le centre mais aucun être humain en vue. Le zoo même n’a plus ses animaux. Plus personne ne répond au téléphone dans aucun pays du monde, la télévision n’offre qu’un écran scintillant, les pages internet n’existent plus. Il est seul. Sans qu’il sache pourquoi.
Jonas entreprend de vérifier sa solitude. Il se rend chez son père, dans la maison où il a grandi, en Angleterre où sa petite amie était partie rendre visite à sa sœur. Il collecte les caméras de surveillance, les enregistrements pour prendre au piège une hypothétique trace de vie. Ne pas désespérer, ne pas tomber fou.
L’écriture est d’une grande simplicité, très sobre, dépourvue de toute sensibilité, très efficace, très angoissante.

À midi, il eut exploré la gare jusque dans ses derniers recoins. Tous les trains. Tous les bureaux de l’administration des chemins de fer. Le salon d’accueil. Le restaurant, où il avait quelquefois fort mal mangé et où cela sentait encore le graillon. Le supermarché. Le bureau de tabac. Le dépôt de journaux et de livres. À coups de pince, il avait défoncé des vitrines et des portes en verre, et écrasé des alarmes hurlantes. Il avait fouillé jusqu’aux réduits au fond des cagibis. Du pain vieux de deux jours indiquait quand il y avait eu quelqu’un ici pour la dernière fois.
Le grand tableau, au centre du hall d’attente, n’annonçait ni trains attendus ni trains en partance.
Les horloges fonctionnaient.
Le distributeur de billets aussi.

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