La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



jeudi 9 mars 2017

Lorsque l’image apparaît il ne peut y avoir de silence, reprend-elle.

Antoine Volodine, Écrivains, 2010.

J’ai récemment relu Écrivains, car Volodine est un auteur que j’affectionne particulièrement. La preuve, je vous ai déjà parlé de ce livre, mais je recommence !

Sept portraits d’écrivains, tous les plus modestes les uns que les autres. D’ailleurs plus que des écrivains, ce sont des gens qui écrivent ou qui parlent, qui se définissent par leur rapport aux mots, différents des autres, un rapport non utilitaire, à peine politique. Pas l’un d’eux n’effleure la figure de l’écrivain, telle que l’on peut vaguement l’imaginer. Ils vivent dans un monde tellement dégradé que ce goût pour les mots est la seule chose qui subsiste dans ces êtres. Ils n’ont aucun public, aucun lectorat, aucune reconnaissance, mais sont discrètement à part.

Leur respiration n’a plus servi qu’à assurer leur survie en tant que corps inutiles, disons en tant que poumons avec conscience, en tant que poumons bavards. Leur mémoire est devenue un recueil de rêves. Leurs marmonnements ont fini par façonner des livres collectifs et sans auteur clairement revendiqué. Ils se sont mis à ruminer sur les promesses non accomplies et ils ont inventé des mondes où l’échec était aussi systématique et cuisant que dans ce que vous appelez le monde réel.
E. Pignon-Ernest, Grenoble, 1976, dessin. M&M.

Celui qui a passé sa vie en prison et n’a publié que quelques titres que personne n’a lus.
Celle qui est en prison pour des meurtres politiques et qui parle des écrivains post-soviétiques aux morts et aux herbes folles.
Celui qui se souvient de ce long récit bourré de fautes tracé sur un protège-cahier d’enfant alors qu’il est battu à mort par deux fous furieux.
Une très amusante série de remerciements placés en tête de différents ouvrages.
Celui qui a construit l’œuvre le plus discret possible, mais comme un plan stratégiquement conçu.
Une femme qui est morte et qui fait un discours sur l’image.
Un homme qui raconte les purges staliniennes en s’adressant à des objets dépareillés.

Il se rappelle cette phrase et les images qui se bousculaient dans sa tête, et l’ivresse chaude qui coulait en lui à l’idée qu’il était en train d’écrire une histoire, d’écrire ce qu’il fallait et exactement comme il le fallait, il se rappelle cette satisfaction qui l’accompagnait alors que pourtant il écrivait laborieusement, sans fluidité parce que ses doigts ne maîtrisaient pas enccore les réflexes élémentaires et les codes…

Un très bel hommage aux écrivants.

Volodine sur le blog :




2 commentaires:

miriam a dit…

il faut vrament que je m'y mette et que je découvre Volodine

nathalie a dit…

C'est un auteur que j'aime vraiment beaucoup. Ceci dit, je ne sais pas si c'est une bonne idée de commencer par ce titre.