Antoine Volodine, Écrivains, 2010.
J’ai récemment relu Écrivains, car Volodine est un auteur
que j’affectionne particulièrement. La preuve, je vous ai déjà parlé de ce livre, mais je recommence !
Sept portraits d’écrivains, tous
les plus modestes les uns que les autres. D’ailleurs plus que des écrivains, ce
sont des gens qui écrivent ou qui parlent, qui se définissent par leur rapport
aux mots, différents des autres, un rapport non utilitaire, à peine politique.
Pas l’un d’eux n’effleure la figure de l’écrivain, telle que l’on peut
vaguement l’imaginer. Ils vivent dans un monde tellement dégradé que ce goût
pour les mots est la seule chose qui subsiste dans ces êtres. Ils n’ont aucun
public, aucun lectorat, aucune reconnaissance, mais sont discrètement à part.
Leur respiration n’a plus servi qu’à assurer leur survie en tant que corps inutiles, disons en tant que poumons avec conscience, en tant que poumons bavards. Leur mémoire est devenue un recueil de rêves. Leurs marmonnements ont fini par façonner des livres collectifs et sans auteur clairement revendiqué. Ils se sont mis à ruminer sur les promesses non accomplies et ils ont inventé des mondes où l’échec était aussi systématique et cuisant que dans ce que vous appelez le monde réel.
E. Pignon-Ernest, Grenoble, 1976, dessin. M&M. |
Celui qui a passé sa vie en
prison et n’a publié que quelques titres que personne n’a lus.
Celle qui est en prison pour des
meurtres politiques et qui parle des écrivains post-soviétiques aux morts et aux
herbes folles.
Celui qui se souvient de ce long
récit bourré de fautes tracé sur un protège-cahier d’enfant alors qu’il est
battu à mort par deux fous furieux.
Une très amusante série de
remerciements placés en tête de différents ouvrages.
Celui qui a construit l’œuvre le
plus discret possible, mais comme un plan stratégiquement conçu.
Une femme qui est morte et qui
fait un discours sur l’image.
Un homme qui raconte les purges
staliniennes en s’adressant à des objets dépareillés.
Il se rappelle cette phrase et
les images qui se bousculaient dans sa tête, et l’ivresse chaude qui coulait en
lui à l’idée qu’il était en train d’écrire une histoire, d’écrire ce qu’il
fallait et exactement comme il le fallait, il se rappelle cette satisfaction
qui l’accompagnait alors que pourtant il écrivait laborieusement, sans fluidité
parce que ses doigts ne maîtrisaient pas enccore les réflexes élémentaires et
les codes…
Un très bel hommage aux
écrivants.
Volodine sur le blog :
il faut vrament que je m'y mette et que je découvre Volodine
RépondreSupprimerC'est un auteur que j'aime vraiment beaucoup. Ceci dit, je ne sais pas si c'est une bonne idée de commencer par ce titre.
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