Apollinaire, Calligrammes, « La nuit d’avril 1915 » dans la partie « Case
d’Armons ».
Le ciel est étoilé par les obus des Boches
La forêt merveilleuse où je vis donne un bal
La mitrailleuse joue un air à triples-croches
Mais avez-vous le mot
Eh ! oui le mot fatal
Aux créneaux Aux créneaux Laissez là les pioches
Comme un astre éperdu qui cherche ses saisons
Cœur obus éclaté tu sifflais ta romance
Et tes mille soleils ont vidé les caissons
Que les dieux de mes yeux remplissent en silence
Nous vous aimons ô vie et nous vous agaçons
Les obus miaulaient un amour à mourir
Un amour qui se meurt est plus doux que les autres
Ton souffle nage au fleuve où le sang va tarir
Les obus miaulaient
Entends
chanter les nôtres
Pourpre amour salué par ceux qui périr
Le printemps tout mouillé la veilleuse l’attaque
Il pleut mon âme il pleut mais il pleut des yeux morts
Ulysse que de jours pour rentrer dans Ithaque
Couche-toi sur la paille et songe un beau remords
Qui pur effet de l’art soit aphrodisiaque
Mais
orgues
aux fétus de la paille où tu dors
L’hymne de l’avenir est paradisiaque
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