La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



samedi 19 mars 2022

Nantes, les petits gâteaux

 

 

Suite de la visite du château des ducs de Bretagne à Nantes. La semaine dernière, je vous parlais de la traite négrière. Aujourd’hui, l’accent est mis sur un sujet plus léger : les petits gâteaux.

Plus léger, il faut le dire vite. Nantes, en plus d’être une ville océanique, est aussi une ville où affluent les productions agricoles de la Bretagne et de la Touraine : du lait, de la crème, de la farine. C’est aussi là où arrivent les produits des colonies : le rhum, la vanille, le café, le chocolat, le sucre. Ce n’est pas vraiment un hasard si c’est le lieu idéal pour implanter l’empire LU.

Tableau présentoir. 

Monsieur Lefèvre et madame Utile se marient en 1850 à Nantes. Ils possèdent une pâtisserie. Leurs descendants en feront un fleuron de l’industrie agroalimentaire.


Plan-relief réalisé à l'occasion de l'Exposition universelle de 1900.


Une manufacture est construite en 1885. Sa superficie est de 2000 mètres carrés. En 1900, l'usine produit 15 tonnes de biscuits par jour, dont 10 tonnes de Petit-Beurre. La production est mécanisée, grâce à l'usage de l'électricité et de la machine à vapeur. Le site comprend également des garages et des écuries pour les véhicules de livraison. Il faut des bâtiments pour stocker les matières premières dans des bonnes conditions (du lait, du beurre, des oeufs ! imaginez), mais également le bois et le fer blanc qui serviront à confectionner les boîtes et les caisses. En 1900, environ 500 personnes travaillent là.

Cette ville dans la ville se situe à proximité de la gare et du fleuve pour faciliter l’importation en matières premières et les exportations. 


La fabrique des Petits-Beurres !


À l’exposition de Paris de 1900, un phare est installé au bord de la Seine. Un phare en forme de boîte à biscuits ! Une réplique du phare est exposée au château.

Les deux tours (il en reste une, abondamment restaurée et reconstruite) sont bâties par Auguste Bluyssen entre 1905 et 1909. Elles ne servent à rien, sinon à magnifier l'usine.


Il est aménagé également une belle boutique dans un bâtiment élégant. Les biscuits sont alors considérés comme des produits raffinés et de luxe. J’imagine qu’au XIXe siècle tout le monde n’avait pas les moyens de s’en payer. Rappel qu'on est avant l'ère des supermarchés et que plusieurs produits viennent de loin.


Panneau en céramique réalisé à l'occasion de l'Exposition universelle de 1900 et installé ensuite dans les locaux de l'entreprise. Décor par Eugène Martial Simas. On voit bien les dames élégantes qui mangent des Petits LU.
Panneau publicitaire de Vincent Bocchino (1906) montrant des enfants attroupés devant la vitrine du magasin LU, vitrine où sont exposés tous les objets publicitaires. C'est assez génial puisque les objets en question existent et sont en vente en vrai dans la boutique !

LU, c’est aussi le marketing. Des artistes dessinent des affiches, des cartes et toutes sortes d’objets. Objets à collectionner bien évidemment.

Mucha fait partie des nombreux artistes employés par LU (l'expo que lui consacrait il y a quelques années le Palais du Luxembourg en montrait plusieurs exemples). Mucha collabore avec LU de 1897 à 1903. Il produit des affiches et le décor de plusieurs boîtes. Cette étude pour le calendrier de 1897 fait la promotion des gaufrettes à la vanille.

Des seaux (???) à gâteaux. La forme me laisse profondément sceptique, mais je m'imagine plonger la main dans ce beau seau couvert de coquelicots pour récolter des gaufrettes et autres douceurs.

Vous connaissez l’une des entreprises rivales de LU : la Biscuiterie nantaise, dite BN, elle aussi bien représentée au château.

Aujourd’hui, LU fait partie du groupe américain Mondelez International et les usines sont dispersées partout en France. Les bâtiments de Nantes sont en grande partie détruits ou reconvertis en divers trucs (comme un café salle de spectacle).

Façade d'un autre bâtiment, qui mêle le Petit Beurre à l'esthétique du réalisme socialiste (c'est curieux).


Si le rôle des esclaves dans la culture de la vanille est bien connu (rappel que c’est un esclave, Edmond Albius, qui inventa sur l’île de la Réunion la méthode de pollinisation artificielle toujours pratiquée aujourd’hui), il est important également pour le rhum. Et il n’y a pas de hasard si le cannelé est un gâteau de Bordeaux.


Le blog est à Nantes un billet introductif ; la traite négrière au Château des ducs de Bretagne. La semaine prochaine, de grosses bêtes mécaniques.


J'ai pris toutes ces photos au Château de Nantes.



6 commentaires:

keisha a dit…

As-tu grimpé en haut de la tour Lu? Oui, ça se visite...

nathalie a dit…

Non on s'est contenté de prendre un café en bas.

eimelle a dit…

elle est un vrai phare dans le paysage! Ton article ouvre l'appétit !

keisha a dit…

Un p'tit coin pas mal , en effet, j'ai déjà testé le côté restaurant, et le café, lors de passages à Nantes (c'est près de la gare)

nathalie a dit…

Oui on a envie de gaufrettes à la framboise et autres cigarettes russes...

nathalie a dit…

J'imagine que pour les concerts c'est en effet le bon endroit !