La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



jeudi 9 mars 2023

Pour Tommy. Pour son 3e anniversaire à Terezín – 22.I.1944 !


Pour Tommy. 22 janvier 1944, dessins et textes de Bedřich Fritta, traduit du tchèque, édité en France aux éditions du Rocher, 2023.

 

Le 22 janvier 1944, Tommy a trois ans et son père lui dessine un bel album. Sauf que la famille est emprisonnée à Terezín – Theresienstadt.

Pour Tommy. Pour son 3e anniversaire à Terezín – 22.I.1944 !
La valise porte le numéro de prisonnier de l'enfant. Juché sur elle, il regarde le ciel à travers la fenêtre de la forteresse.

Ils vivaient à Prague, ils étaient juifs. Déportés et emprisonnés, ils réussissent à ne pas être séparés. Le père, la mère et Tommy. Le père est peintre et son talent est réquisitionné pour les projets allemands. En secret, en cachette, on dérobe un bout de papier, un peu de couleur et on représente la réalité de la vie à Terezín, bien éloignée du film de propagande et de ce qu’a bien voulu voir la Croix Rouge. Un jour, les Allemands apprennent l’existence de ces peintures et tout le monde est arrêté et torturé. Heureusement, les artistes ont réussi à cacher les témoignages dans les murs ou dans le sol. Après-guerre, les survivants viendront les chercher. Ces peintures ont ainsi réussi à parvenir jusqu’à nous, rappelant l'existence de ces hommes et femmes pleins de courage et de détermination.

Et cet album a survécu.

Ce sont des dessins pour l'anniversaire d'un petit garçon de trois ans. Il mange, il fait pipi, il dort, il rêve, il joue au train. Le petit garçon a un ventre tout rond, une grosse tête et des fesses à l’air. Il crie et agite sa cuillère. Son père imagine pour lui sa vie d’après, avec les voyages, la musique, les fleurs… Ce sont des aquarelles et des mots tout simples. Les dessins sont pleins de poésie et d’humour, pas question ici de pleurer. C’est un espoir, un rayon de soleil, un message de vie parvenu d’au-delà de la mort. Le père lui promet qu'il y aura encore beaucoup d'autres livres.

C’est extrêmement touchant.


    À gauche : À table !! À droite : Ou plutôt en avion ?



Bedřich Fritta (de son vrai nom Fritz Taussig), le père, et Johanna, la mère, sont morts, l’un à Terezín et l’autre à Auschwitz.

Tommy (de son vrai nom Tomáš Fritta-Haas) a survécu. Un ami survivant lui a remis l’album à ses 18 ans.

Vous avez peut-être vu le documentaire passé sur Arte L’Art dans les camps. À la fin apparaît David, fils de Tommy. Il feuillette l’album venu de si loin dans la cellule même de Terezín où sa famille a été enfermée et a vécu. C’est un passage très émouvant.

Ce n’est pas un conte de fées, c’est la vérité !
Avec la nature qui renaît sur les ruines de 
Terezín.
 

Le livre ne comporte aucune indication de langue ou de traduction ( ????). Heureusement, j’ai envoyé un courriel à l’éditeur et on m’a répondu.

Les légendes accompagnant les dessins sont en tchèque, mais du tchèque pour un enfant de trois avec jeux, détournements et approximations. Elles ont été traduites en allemand par Tomáš Fritta-Haas lui-même. Ces légendes mises en allemand et la préface de Tomáš Fritta-Haas ont été traduites en français par Hélios Azoulay, qui est l’auteur d’un texte explicatif placé à la fin du livre.

Merci Joëlle Veron-Durand pour cette réponse détaillée !

 

Deuxième participation pour le mois de mars en Europe de l’Est sur les blogs.









6 commentaires:

keisha a dit…

Fichtre, c'est bouleversant!!!

nathalie a dit…

Oui c'est un fragment de vie parvenu du passé, où tout est mort. Il est lumineux, il dégage une force incroyable.

Dominique a dit…

quel amour il a fallu pour transformer un présent effrayant en joie pour un enfant
je me souviens lors de ma première visite à Varsovie il y avait une exposition des dessins des enfants de Terezin ce que j'y ai vu je n'ai jamais pu l'oublier

nathalie a dit…

Oui il faut un amour peu commun pour vaincre toute cette réalité et faire ce cadeau inestimable. Les oeuvres d'art produites dans les camps sont très émouvantes en général.

Patrice a dit…

C'est extremement émouvant de s'imaginer l'enfant âgé de 18 ans lorsqu'il reçoit ces dessins... Merci pour cette très belle découverte.

nathalie a dit…

Oui, suffisamment émouvant pour qu'il soit difficile d'en parler.