La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



jeudi 17 novembre 2011

Elle ne peut sortir du passé aussi facilement qu’elle se l’imagine. Fraîche et parfumée comme après un bain.


Imre Kertész, Liquidation, traduit du hongrois par Natalia Zaremba-Huzsvai et Charles Zaremba, 1e édition 2003, Arles, Actes Sud, 2004.

Après la trilogie Être sans destin, Le Refus et Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas, j’ai relu Liquidation. Un livre complexe, qui embrasse les précédents et qui revient à nouveau sur l’impossibilité de vivre après Auschiwtz car, que l’on y ait survécu ou non, quelle différence ?
Le narrateur principal est Keserű, un éditeur dont la lassitude ressemble à celle du narrateur du Refus. Il est train de lire une pièce de théâtre laissée par B. après son suicide, à moins qu’il ne se remémore B., à moins qu’il ne soit en train d’imaginer l’œuvre que B. a nécessairement dû laisser après son suicide.
B. est né à Auschwitz, son tatouage n’est pas sur son bras mais sur sa cuisse, parce qu’il n’y a pas assez de place sur le bras d’un bébé pour le tatouer. B. a le ton désespéré du narrateur de Kaddish. Keserű essaye de le convaincre d’écrire sur son histoire, puis après son suicide tente de le comprendre au travers des femmes qui l’ont aimé. La vie des personnages s’est déroulée sous la Hongrie communiste – quand l’édition est censurée – mais le récit est effectué vers 1990 – quand l’édition devient commerciale.
Il est toujours impossible d’écrire et l’expérience d’Auschwitz ne laisse personne indemne, que l’on y ait été ou pas. Encore une fois, un livre court - 120 pages - à la narration complexe et aux pensées dérangeantes.

-       Par ailleurs, Bé ne s’est jamais considéré comme un écrivain, ai-je dit.
Je voyais que cela te surprenait :
-       Pourtant il écrivait…
-       Parce que c’était son seul moyen d’expression. Mais le véritable moyen d’expression de l’individu, disait-il, c’est sa vie. Vivre la honte de la vie et se taire : voilà le plus grand exploit. Combien de fois l’a-t-il et répété, jusqu’à la folie.

Une nouvelle participation au challenge de Mazel





7 commentaires:

Syl. a dit…

Pas pour moi. Je n'aime pas cette époque.

grillon a dit…

Ce livre me tente, envie d'être dérangée peut-être ... c'est vrai , on ne sort pas indemne encore aujourd'hui d'une visite à Auschwitz.

nathalie a dit…

Je comprends Syl., j'avoue les lire à petites doses. Là je me fais une spéciale "relecture de Kertész" mais après il reposera pendant un certain temps.
Grillon : c'est un très bon livre mais je ne sais pas trop si il est aussi lisible si on n'a pas lu la trilogie, je ne me rends pas bien compte de l'autonomie du texte même si Kertész est toujours suivi par les mêmes obsessions.

Asphodèle a dit…

euh...disons que j'évite les lectures "brutales" de ce genre bien qu'en en ayant toujours une vision têtue. Quand tu dis "quelle différence d'en être revenue ou pas (d'Auszwitch)", pour en connaître au moins une qui en est revenue, je dis : il y a une différence et de taille ! Après ce qu'en dit la littérature est une autre problématique... Mais je salue bien bas tes lectures, toujours exigeantes et difficiles :)

nathalie a dit…

Oui bien sûr Aspho. Kertész (qui en est revenu) semble considérer que le monde entier est survivant à Auschwitz et que toute la société se trouve dans ce cas. Et en même temps qu'on ne peut jamais survivre réellement à Auschwitz. C'est un peu compliqué et délicat et je ne suis pas certaine de bien rendre sa pensée parce qu'elle va souvent à contrecourant de ce que l'on pense ordinairement. En l'occurrence pour ce livre, c'est plutôt l'après Auschwitz qui l'intéresse : vivre et raconter.

Alex Mot-à-Mots a dit…

Des livres pas faciles à lire, mais indispensables.

mazel a dit…

bonjour Nathalie,
bien enregistré, je ferais un récapitulatif en fin d'année.

Pour ma part, lu "le golem" de Gustav Meyrink
et
"Le Turquetto" de Metin Arditi. L'auteur n'est pas juif, mais l'histoire si.

Pas encore choisi celui que je lirai en décembre.

bonne continuation avec Imre Kertész,

bises