Alice Munro, Secrets de
Polichinelle, traduit de l’anglais par
Céline Schwaller-Balaÿ, parution originale 1995.
Troisième et dernier livre de
Munro que je lis qui s’avère avoir un talent plus varié que ce que je pensais.
Il ne s’agit pas à proprement
parler de nouvelles, mais plutôt de courts récits de 40-70 pages. À chaque
fois, des femmes en sont des héroïnes. Pas toujours la femme que l’on pense,
c’est quelquefois une autre voix qui va venir en contrepoint. Ce sont des
récits intérieurs, des souvenirs, des lettres. On se remémore les traumatismes
subis, les humiliations, les secrets terribles et enfouis.
Qu’est-ce qui clochait chez les femmes comme elle ? Parfois, il suffisait de malchance. Ou d’un mauvais jugement à un moment décisif. D’un excès de vivacité et d’assurance, autrefois, qui avait mis les hommes mal à l’aise ?
J’ai nettement préféré Les Lunes de Jupiter qui est un recueil plein
de finesse et d’acuité. Les histoires y sont plus anodines, les narrations plus
resserrées, les mots les plus subtils. Ici, les douleurs enfouies sont plus
graves et violentes. Je n’ai pas ressenti le même attachement, la même
vibration, comme si Secrets de Polichinelle parlait moins à l’intime.
On ne peut laisser ses parents approcher de ses véritables humiliations.
Une sensation troublante provient
du fait que plusieurs des récits ont une proximité avec certains épisodes de Du côté de Castle Rock. Dans le prologue de ce
roman, Munro avertissait qu’elle avait relié plusieurs histoires, et qu’elle ne
garantissait pas toujours la véracité de ce qui y était raconté. La lecture des
Secrets de Polichinelle jette le
trouble : ces morts, ces disparitions, ces viols qui ne sont pas rapportés
dans Du côté de Castle Rock en
font-ils partie ? La superposition des volumes fait douter, introduit le
trouble dans les narrations si jamais le lecteur essaie de relier les différentes
histoires entre elles.
Je pense que ce trouble est le
cœur du talent de Munro qui fouille les drames intérieurs vécus par les hommes
et les femmes, dans un monde rétrograde et toujours compliqué pour les femmes,
engoncées dans les exigences sociales dont elles sont à la fois les victimes et
les gardiennes. Elle a le talent rare de raconter le quotidien et la petite vie
intérieure.
Avoir des enfants vous changeait.
Cela rendait votre position d’adulte suffisamment avantageuse pour vous
permettre d’éliminer et d’abandonner entièrement certaines parties de vous –
les anciennes. Le travail, le mariage ne faisaient pas tout à fait la même
chose : ils vous faisaient seulement agir comme si vous aviez oublié certaines choses.
Il me tente, mais les avis mitigés des participantes à cette LC, me font un brin douter ! à voir donc !
RépondreSupprimerHonnêtement Les Lunes de Jupiter me semble bien plus fort. Je le conseillerais.
RépondreSupprimerJe retiens donc "les lunes de Jupiter" pour une prochaine lecture le l'auteur.
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RépondreSupprimerTrès tentant!
RépondreSupprimerUn auteur intéressant, qui mérite qu'on prenne le temps de la découvrir.
RépondreSupprimerJe viens de faire connaissance avec Munro et ce que vous écrivez ici de "Castle Rock" m'a particulièrement intéressée - je mettrai un lien vers votre billet.
RépondreSupprimerPour la fiction, je retiens "Les lunes de Jupiter" que beaucoup mettent en avant.
Bonjour Tania. J'espère que votre lecture vous plaira et vous intéressera.
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