John Irving, Dernière nuit à Twisted River, traduit de l’américain par Josée
Kamoun, publié en 2009.
Un grand roman à lire sans trêve.
Le récit commence dans un village
de bûcherons, Twisted River, dans les années 50, là où la rivière conduit les
troncs des arbres jusqu’à la scierie. Les deux personnages principaux sont le
cuisinier de la cantine locale, Dominic, et son fils Daniel, adolescent à
l’époque. La mère est morte, dans des circonstances pas très claires. À la
suite d’un drame qui comporte sa part de loufoquerie, le père et le fils
partent en cavale, fuyant un shérif fou furieux. Les 600 pages suivront leur
errance, l’installation de restaurants en restaurants, la recherche de
compagnes, la naissance d’un fils, l’amitié fidèle et l’histoire des États-Unis
comme un pays qui se défait.
« Eh ben, quand il se déclare un écrivain dans une famille, si tu veux mon avis, avait dit Ketchum, c’est un coup dur et voilà tout. Nous on se fâche quand il nous met dans ses livres, on se fâche quand il nous y met pas, on lui reproche de pas écrire sur lui-même, sur ce qu’il est vraiment, quoi. Et par-dessus le marché de faire de son ex-femme un personnage bien plus chouette qu’en réalité ! »
Mon entrée en matière a été un
peu lente, car le début comporte beaucoup d’informations à assimiler. Mais
ensuite, je me suis attachée aux personnages, au renouvellement de l’intrigue
et à l’irruption de l’imprévu. J’avoue une faiblesse pour les héros cuisiniers,
qui décrivent la difficile mise au point de tel ou tel plat – en l’occurrence
ce roman mange bien. J’ai été un peu perturbée par le fait que Daniel devienne
écrivain, mais Irving entrelace ainsi habilement l’intrigue de son roman et
celles des romans enchâssés, mettant le doute sur la réalité du récit et sur le
jeu autobiographique. Il excelle aussi à élaborer progressivement des
personnages qui prennent peu à peu de l’épaisseur, comme Ketchum, l’homme des
bois, le bûcheron, amateur d’armes et de chasse, qui jure des Immaculée
Constipation et qui veille sur les deux fuyards.
Le roman raconte toute la vie de
Daniel, vie pleine de drames et de chagrins, symbole de l’écrivain américain à
succès interrogé sur la politique de son pays et couchant avec ses
fans/éditrices. Il raconte ce qui est important, à savoir le sexe et la mort,
les deux se mêlant en détails quelquefois pathétiques.
Je note une très intéressante
considération sur l’abus de points-virgules : on dirait des
moucherons écrasés sur la virgule.
La rivière, elle, continuait de
couler comme coulent les rivières. Sous les troncs, le corps d’un jeune
Canadien allait au fil du courant, qui le bourlinguait d’une berge à l’autre,
rive droit, rive gauche. Et si, en ce point précis du temps, Twisted River
paraissait aussi nerveuse, voire aussi impatiente, peut-être voulait-elle que
le corps du jeune homme avance, plus loin, toujours plus loin.
J'ai été légèrement déçue par cette lecture. C'est un auteur que j'appréciais beaucoup quand j'étais ado.
RépondreSupprimerJ'avais lu un seul roman d'Irving auparavant et il y a plusieurs années, donc c'était presque une découverte.
SupprimerJe réalise que j'ai pas encore publié ma chronique tiens (fait partie de celles que je garde sous le coude en cas de disette).
RépondreSupprimerMa découverte d'Irving et un gros coup de cœur pour moi. Bon, faut que je me refasse un Irving cette année, faut pas que je fasse traîner.
J'ai un peu honte de dire que je n'en ai lu que deux. Du retard à rattraper !
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