Mary Austin, Le Pays des petites pluies, traduit de l’américain par François
Specq, publication originale 1903, édité en France au Mot et le reste.
Petit livre très dense : un
trésor.
Le Pays des petites pluies n’est pas un roman. Il s’agit de courts
textes décrivant autant que possible le désert du Sud de la Californie. Encore
que le terme « désert » soit loin d’être exact. Austin refuse en
effet l’emploi de ce terme qui englobe toute une région dans une seule appellation
du point de vue de l’être humain et en particulier du colon blanc, qui est souvent aveugle aux réalités du lieu.
Au milieu du désert, où le bétail est absent, il n’y a pas de charognards, mais si vous vous enfoncez suffisamment loin dans cette direction vous avez toutes les chances de sentir sur vous l’ombre de leurs ailes relevées. Rien de la taille d’un humain se déplacer inaperçu dans cette contrée et ils savent très bien comment cette terre traite les étrangers. On peut trouver là des indices de la manière dont un territoire impose de nouvelles habitudes à ceux qui l’habitent.
Or elle s’attache
à détailler toute la diversité des existences de la faune et de la flore au fil
des saisons, les altitudes, les climats... Elle en montre toute la richesse
et l’originalité et présente surtout les interactions entre les modes de
vie de chacun, entre une herbe et un rongeur, un oiseau et une certaine heure du jour. Ce territoire est observé à hauteur de musaraignes ou de petits
oiseaux : les sources, la moindre goutte d’eau, les sentes dans l’herbe,
les bruits des plantes qui poussent, le son de la rivière. La vie est passionnante vue d'en bas !
La forme d’une montagne jeune est grossièrement pyramidale et s’effile en longues crêtes semblables à des nageoires de requin qui viennent s’enfoncer et se fondre dans d’autres sierras fracassées par la foudre. De loin vous avez un effet de dent de scie, mais de près les masses de granite présentent le terrible poli hérité des anciennes périodes glaciaires.
S’il s’agit de textes plutôt
contemplatifs, l’auteur désigne les plantes par leur nom scientifique et leur
nom populaire, mais toujours avec une précision originale. Pas d’évocation
poétique et rêveuse, mais une description au plus près du réel. Quant à la
toponymie, Austin choisit volontiers les noms indiens ou mexicains, aux dépens
de l’américain, y trouvant sans doute une plus grande vérité.
J’ai adoré cette lecture,
apaisante, pleine d’humanité. On n’est pas dans l’amour béat et naïf pour la
nature, mais dans une connaissance documentée par l’expérience et les
anecdotes. Austin sait la vertu des petits insectes affairés, donne la préférence
à telle montagne ou telle rivière. Elle vit ce territoire et raconte aussi l'histoire de ses habitants, humains ou non.
L’origine des cours d’eau est
comme celle des pleurs, claire pour l’esprit mais mystérieuse pour les sens. Ils
s’y affairent sans cesse, mais on les prend rarement sur le fait. Ici dans la
vallée, l’eau ne s’arrête jamais, même à la saison où ce pingre de gel lui
compte le droit d’être en mouvement. Elle met à profit l’heure du midi et tinte
délicatement toute la nuit sous la glace.
Deux bémols à cette
édition : l’absence de carte et de glossaire. Cela ne facilite pas la
lecture.
Bien sûr, Dominique a aimé.
Grâce à Dominique je pense, ce livre fait partie de mes lectures du futur, le plus difficile étant de mettre la main sur un exemplaire. Quand on a lu thoreau, Muir, Leopold, etc, finalement ce livre est indispensable aussi.
RépondreSupprimerOui en effet. L'éditeur est marseillais, peut-être pas évident à trouver partout (même si j'avoue avoir acheté mon exemplaire au Salon du Livre de Paris).
SupprimerBonjour,
SupprimerNous sommes heureux de voir que cette lecture vous tente. Vous pouvez commander l'ouvrage dans toutes les bonnes librairies ou vous rendre sur notre site (www.lemotetlereste.com) si vous n'y avez pas accès.
Bonne journée et bonnes lectures !
Le mot et le reste
Ah mais je suis déjà allée sur votre site! Mais n'ai pas trouvé comment commander si on est 'simple lecteur'. Mais depuis j'ai trouvé sur le site d'une librairie le moyen de commander deux livres de chez vous (et quand je dis librairie, ce n'est pas A...) mon bonheur est complet!
SupprimerTout à fait ce que j'aime et si en plus tu as aimé et que Dominique aussi !
RépondreSupprimerC'est convaincant, n'est-ce pas ?
SupprimerIl va être difficile de mettre la main sur un exemplaire, maintenant que tu nous a donné envie.
RépondreSupprimerAllons, un petit effort !
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