La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



lundi 5 octobre 2015

Nitti la regarda comme une dorade qui se serait mise soudain à chanter.

Francesca Melandri, Plus haut que la mer, traduit de l’italien par Danièle Valin, parution originale en 2011.

Une belle lecture.

C’est une petite île dédiée à être une prison de haute sécurité (on est en Italie, en 1979). Le mistral se lève, le bateau part et deux visiteurs se retrouvent bloqués sur l’île-prison. Luisa et Paolo vont passer la nuit là, surveillés par le gardien Nitti.
Contrairement à ce que je craignais, la situation exceptionnelle de l’île n’est pas un simple prétexte pour isoler deux personnes qui n’ont rien en commun. La mer, le vent, la présence des détenus, la puissance de la nature vont s’incorporer aux réflexions des personnages, naturellement amenés à réfléchir à leur situation et aux raisons qui les amènent là. L’un visite son fils, auteurs de plusieurs attentats politiques et l’autre son mari qui a tué un homme un soir de beuverie. Un professeur d’histoire et une paysanne venue du Nord du pays.

Chaque fois que la conscience de soi lui revenait, elle pesait sur sa poitrine comme une pierre tombale. Paolo expira longuement, la bouche ouverte, comme s’il devait se libérer d’un grand poids.
F. Maraini, Sicile, route de Modica, 1950, Florence, Fratelli Alinari, RMN
 L’île et la prison ont une dimension mythique, lieu inaccessible et coupé du monde, enfer carcéral et paradis paysager. Un sanglier surgit sur le chemin la symbolise très bien. J’ai aimé la belle imbrication entre le passé des personnages, leur nuit qui vient comme un événement exceptionnel et leur découverte de ce lieu si particulier, avec les allers et retours entre le quotidien sordide de la prison et les échappées sur la nature.
J’ai trouvé que l’écriture était un peu froide. L’auteur ne joue pas sur l’émotion ou l’attachement, tout reste extrêmement tenu. On conserve jusqu’au bout une petite distance, comme s’il s’agissait d’une sorte de conte.

Le bateau leva l’ancre. L’agent carcéral Nitti Pierfrancesco, immobile tache grise sur le quai de pierre blanche, le suivit du regard pendant qu’il manœuvrait pour sortir du port, tournait sa proue vers le large, devenait tout petit sur l’horizon. Il gardait les yeux bien ouverts pour que tout le monde sache qu’ils étaient fixés sur l’embarcation qui s’éloignait. En réalité, il était comme un aveugle qui, même les paupières levées, ne voit rien et ne perçoit que les bruits.



L'avis de Clara et de Dominique, elles ont été plus touchées que moi.

10 commentaires:

  1. j'en parlerai dans quelques jours!

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  2. Je l'avais noté, mais je ne ressens pas un grand enthousiasme dans les billets ...

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    1. J'ai été amenée à le lire via mon club de lecture, je ne l'aurais sans doute pas fait sinon.

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  3. un beau billet mais je n'ai pas du tout trouvé l'écriture froide, au contraire. Mon billet paraîtra vers la fin du mois en même temps que celui d'Eimelle (challenge du mois italien)

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    1. Oui, j'ai vu que d'autres lectrices avaient aussi un avis très différent.

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  4. @ Hélène : J'ai adoré, et j'ai lu plusieurs autres billets enthousiastes ensuite
    @ Nathalie : C'est justement parce que l'émotion est contenue que j'ai vraiment adoré ce roman.

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    1. Je comprends tout à fait cette réaction (différence de goûts et de personnalité), mais j'avoue que moi j'ai eu du mal à m'intéresser plus profondément à ce qui m'était raconté.

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  5. Ton billet rejoint ceux du mois italien et me donne envie de découvrir Francesca Melandri. J'ai un livre de cette auteure chez moi que je vais bientôt lire.

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    1. Mon avis est mitigé, mais quand même plutôt positif !

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