Mikhaïl Boulgakov, La Locomotive ivre, recueil de textes
satiriques traduits du russe par Renata Lesnik, édités par Ginkgo.
De Boulgakov j’ai lu jusqu’ici (à
plusieurs reprises) Le Maître et Marguerite. Ces récits et nouvelles se tiennent dans le monde soviétique, à
Moscou et dans ses environs, notamment dans des gares, des années 1920. Ils
sont satiriques et volontiers délirants – à moins qu’ils ne décrivent sans
exagération un monde totalement absurde.
La question du logement est
primordiale, car le partage des appartements et la cohabitation forcée sont des
soucis récurrents chez tous les moscovites du temps. Dans une nouvelle, la
pénurie de logements contraint des personnages à décider d’habiter un tramway,
en achetant à la préposée tous les tickets de la journée (aucune loi ne
l’interdit). C’est ainsi que chaque famille élit domicile dans un wagon d’une
ligne différente pour son plus grand bonheur.
Comme chez Gogol à une autre époque,
l’administration russe en prend pour son grade. Inutile, nombreuse,
incompétente, lâche, corrompue et toute puissante, on sent que l’expérience
quotidienne de sa fréquentation nourrit un imaginaire vif. Les cadres mettent
en place des décisions stupides, vite annulées, se lancent dans des discours
sans les comprendre et se heurtent au bon sens des habitants.
On trouve aussi dans ce recueil l’histoire
d’un homme parvenant à démasquer une fausse momie égyptienne qui ne connaît pas
Karl Marx, des blagues mettant en scène Staline et beaucoup d’alcool.
- Mais, là-bas, M’sieur, en plein
sur votre voie, il y a une locomotive totalement ivre…
- Comment ça ?
La silhouette émit un petit rire
et précisa :
- Eux, quand ils ont bien bu, pour
faire une bonne blague, au lieu d’eau, ils la remplissent de vodka. Après ça,
elle ne bouge plus et elle siffle…
Sur le quai, chef de train et
voyageurs furent frappés de stupeur.
Moscou. Image Wikipedia. |
Une lecture très agréable, qui
nous plonge dans l’URSS de la grande époque. On ne sait jamais trop si on doit
rire ou pleurer, car on sent que le réel n’est jamais loin de la farce. On sent
par ailleurs que l’auteur éprouve un réel attachement pour Moscou dont il
décrit l’évolution au fil des années.
Un bémol : je trouve que
l’édition n’indique pas assez clairement la provenance des textes. Il est dit
que la plupart sont inédits, mais c’est un peu vague pour moi.
J'ai récemment vu une série adaptée des nouvelles de cet auteure et j'ai adoré ! Tout à fait le genre de ton qui me plaît.
RépondreSupprimerEt bien écoute, je ne comptais pas garder le livre (j'ai aimé sans être archi fan), donc je te le mets de côté, il sera pour toi.
Supprimerun auteur passionnant mais comme je ne suis pas du tout amateur de nouvelles je ne suis pas certaine d'être séduite
RépondreSupprimerPour certains textes, on est entre la nouvelle et l'anecdote de 2-3 pages, il faut en effet aimer le court.
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