Rire enchaîné. Petite anthologie de l’humour des esclaves noirs
américains, textes traduits et présentés par Thierry Beauchamp, édité en
2016 par Anacharsis.
Est-ce que le titre ne dit pas
tout ? Ce recueil rassemble des textes d’humour qui circulaient
clandestinement parmi les esclaves noirs américains, avant la guerre de
Sécession, textes qui ont été mis par écrits, édités et traduits. Ces récits proviennent
de l’intérieur des plantations du Sud et non des intellectuels abolitionnistes.
Il ne s’agit pas ici de franche
rigolade, mais plutôt de contes satiriques, de petites scènes acides, pleines
de non-dits. On y joue des clichés sur les esclaves – menteurs, lâches et
paresseux – aux dépens des maîtres blancs, qu’ils soient bons ou méchants. Ces
contes ont aussi des allures de fables, même si la morale peut être du côté du
plus fort, et puisent quelquefois à un fonds commun à bien des cultures (l’un
des contes se trouve ainsi sous une autre version parmi les Contes d’Andersen). Ce sont souvent des
duperies tentées par l’esclave pour ne pas avoir à travailler, pour ne pas
avoir à se battre ou pour faire grogner le maître.
L’humour est l’arme utilisée par ceux
qui ne peuvent pas se révolter. C’est un recueil très instructif, au ton
souvent ironique.
Quand des éclairs zèbrent le
ciel, c’est signe que les anges se regardent dans leurs miroirs, et quand le
tonnerre gronde, c’est signe qu’ils roulent les tonneaux d’eau de pluie, et
quand il se met à pleuvoir, c’est qu’un ange maladroit a renversé un tonneau.
Un jour, une grande fête
s’annonçait au paradis et les anges avaient tous revêtu des vêtements neufs et,
comme ils s’admiraient dans leurs miroirs, il y avait des éclairs partout dans
le ciel. Le bon Dieu demanda aux anges d’apporter des tonneaux d’eau de pluie
et le tonnerre se mit à gronder d’est en ouest. Bien sûr, les anges maladroits
renversèrent quelques tonneaux et il ne tarda pas à pleuvoir des cordes.
Une terrible inondation ravagea
un patelin nommé Johnstown et tant de gens se noyèrent qu’on se serait cru le
jour du Jugement dernier.
Certains noyés allèrent au Ciel
et d’autres pas. Et, comme vous le savez, il faut un nègre dans chaque histoire
et l’un de nos frères noyés au cours de l’inondation monta aux cieux.
J'ai hésité à l'acheter, lors d'une visite au stand des Editions Anacharsis dans un salon... je regrette un peu, maintenant (mais juste un peu, je peux toujours me rattraper en librairie...)
RépondreSupprimerJe l'ai acheté à la boutique du Musée de l'homme à Paris ! le hasard fait que je suis tombée dessus.
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