La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



lundi 23 avril 2018

Comment justifiez-vous votre existence ?

Isaac Asimov, Les Veufs noirs, volume Omnibus regroupant 5 titres parus originellement dans des magazines, puis dans des recueils de 1971 à 1990, traduit de l’américain par Michèle Valencia.

Les Veufs noirs ? Six amis grincheux et bruyants qui se réunissent tous les mois au restaurant (entre hommes hein !), avec Henry, le serveur attitré, et un invité. Et à chaque fois se glisse dans la conversation un mystère. Pas forcément un gros mystère, même s’il y a des meurtres et des codes secrets américano-russes, mais aussi des testaments bizarres, des disputes sans fondements, des trous de mémoires inexpliqués. Et nos Veufs résolvent tout ça ! Enfin, surtout le serveur.

Le menu ayant été préparé avec une négligence telle qu’il commençait par des artichauts, Rubin se lança dans une dissertation sur la seule préparation adéquate de la sauce d’accompagnement. Puis, lorsque Trumbull déclara avec dégoût que la seule préparation qui convenait aux artichauts était une poubelle, Rubin répondit :
- Bien sûr, si vous ne disposez pas exactement de la sauce qu’il faut, dans ce cas-là, bien sûr.

J’ai pris ce gros recueil de nouvelles, comme un gros sac de bonbons. Un ou deux par soir, en cure continue, un délice. Amateurs d’intrigues, de logique, d’astuce, c’est pour vous. On est dans l’hommage évident à Agatha Christie et à son club du mardi, même si bien sûr, ces bonshommes pontifiants s’offusquent d’être ramenés à une vieille anglaise. Chaque nouvelle reprend inlassablement les mêmes petits clins d’œil, comme dans une bonne série et le lecteur se régale à deviner par avance de quoi il va être question et ce qui sera le ressort de l’intrigue (j’avoue avoir deviné plusieurs fois même si ne pas être de culture américaine constitue clairement un handicap). J’avoue également m’être interrogée sur certains des repas servis dans ce restaurant – que dire de la bouillabaisse qui contient du homard et des Saint-Jacques ?!!! Je soupçonne l’ironie d’Asimov de s’être exercée également sur la cuisine et sur ses personnages. Car le ton est plein d’humour, d’ironie et de finesse.
J. Gris, Un homme au café, 1912 Philadelphie.
Une part du plaisir du lecteur provient également du commentaire d’Asimov qui suit chaque nouvelle : il explique d’où vient son idée, son contexte d’écriture, son désaccord sur le titre, un souvenir personnel. Ses discussions avec le magazine où est initialement parue la nouvelle. Le tout en mettant en scène sa propre mégalomanie avec beaucoup d’autodérision.
Un grand plaisir de lecture.

- Qu’est-ce ? dit soudain Rubin, en fixant son assiette avec consternation.
- Du pâté maison, monsieur, dit doucement Henry.
- C’est ce que je pensais. Du foie haché. Bon Dieu ! Henry, je le demande à l’homme pathologiquement honnête que vous êtes, est-ce que cela se mange ?
- La question est subjective, monsieur. Cela dépend du goût personnel du convive.

Merci Omnibus et Babelio pour la lecture.
L’avis de l’oncle Paul.

2 commentaires:

N’hésitez pas à me raconter vos galères de commentaire (enfin, si vous réussissez à les poster !).