La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



mardi 26 mars 2019

J’ai un secret passionnant que tu aimerais sûrement connaître.

Johanna Sinisalo, Le Reich de la Lune, traduit du finnois par Anne Colin du Terrail, parution originale 2018, édité en France par Actes Sud.

Une aventure dystopique ?
Une femme âgée tient son journal (Kitty…) et raconte sa vie et les événements survenus dans sa jeunesse. On comprend peu à peu qu’après leur défaite les nazis ont trouvé refuge sur la face cachée de la Lune et ont fondé là une petite colonie. Entre science-fiction et propagande délirante, l’héroïne grandit, fascinée par la Terre qu’elle n’a jamais connue et persuadée que le nazisme constitue le beau et le bien de l’humanité. Sauf que les nazis n’ont jamais renoncé au rêve de conquérir la planète et que les événements s’enchaînent plus vite que prévu.

Elle a répondu d’un air sévère que nous devions préserver notre capital physique. Si nous nous habituions à vivre dans la gravité naturelle de la Lune, nous deviendrions très faibles. Et nous serions incapables de reconquérir la Terre si nous étions frêles comme des nouveaux nés comparés aux sous-hommes, aux capitalistes et aux bolcheviks et n’avions même pas la force de fouler son sol.
Erró, Sur la terrasse Fès, 1976, fondation Brownstone.
 Alors, disons-le net, j'aime beaucoup Sinisalo, mais ce roman est clairement moins bien que les précédents. Son potentiel de loufoquerie (avec ces nazis lunaires des années 40 qui débarquent sur terre en 2018) n’est pas du tout exploité, de même que le potentiel de roman d’aventures. La métaphore du papillon et du cyclone est lourdement assenée à plusieurs reprises et l’ensemble prend un ton sérieux et didactique franchement agaçant (mais c’est quoi cette fin ?!).
Je l’ai pourtant lu avec pas mal de plaisir (personne n’est parfait). Peut-être parce que j’étais dans le train et que je l’ai lu comme un bon roman d’aventures à suspense, un peu simpliste certes, mais bien fichu. J’ai surtout apprécié le début avec l’explication du mode de vie sur la lune (les aliments, les vêtements), avec une mention spéciale pour le cinéma. En effet, les nazis ont récupéré plusieurs films, qu’ils ont taillés et réinterprétés à leur sauce. Marlene Dietrich et Charlie Chaplin jouent un rôle important dans le roman et ça, c’est plutôt très bien. Il y a aussi le récit de l’arrivée de l’équipe nazie dans les États-Unis de 2018 avec la découverte de la planète Terre (ses couleurs, ses sons, ses odeurs, ses sensations) et du mode de vie occidental (ah ! le smartphone, les toilettes, la salle de bain !). Dans l’ensemble, j’ai plutôt passé un bon moment.
Bref, lisez plutôt ses précédents romans, sauf si vous prenez le train.

Le programme Apollo a entraîné un rationnement plus sévère des métaux ainsi que d’autres restrictions. Notre vie est devenue nettement plus ascétique, pour la seule et unique raison que quelques Terriens étaient venus ramasser des cailloux pendant un jour ou deux dans un engin miteux plus ou moins fait de balsa et de papier d’aluminium. (J’admets faire preuve d’une ironie un peu lasse, mais, dans nos livres d’histoire, Apollo 11 était présenté comme une invasion de grande envergure, une violation de territoire, une agression presque aussi grave qu’une occupation.)


Sinisalo sur le blog.

Billet de Keisha qui est plus indulgente. 


6 commentaires:

  1. Je ne connais pas encore cette auteure, mais j'ai une LC de Jamais avant le coucher du soleil prévue pour mai... je m'en réjouis à l'avance, et je note que ce titre n'est pas à lire en priorité..

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ah oui c'est le roman avec le troll, bien plus réussi en effet ! J'espère que tu aimeras.

      Supprimer
  2. Je suis faible, oui, je sais. Même si avec les nazis j'ai eu du mal à m'impliquer dans les personnages, forcément. Ceci étant, le côté 'écolo' m'a bien plu.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Moi j'ai trouvé le récit trop simpliste et prêchi-prêcha. Il y avait tout un potentiel qui aurait pu être davantage exploité.

      Supprimer
  3. J'ai lu il y a des années "Jamais avant le coucher du soleil" que j'avais fort apprécié et, depuis, je me suis toujours dit qu'il faudrait que je revienne à l'auteure sans m'y être jamais attelée. Ce ne sera pas avec ce titre, si je comprends bien - ou alors pendant un voyage en train.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Autant que tu lises les autres en effet, ils sont bien meilleurs !

      Supprimer

N’hésitez pas à me raconter vos galères de commentaire (enfin, si vous réussissez à les poster !).