La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



samedi 15 mai 2021

Château de Champs-sur-Marne

 Le blog est dans une série sur le XVIIIe siècle. Aujourd’hui, nous visitons un château d’Île-de-France, celui de Champs-sur-Marne.

Ce château a été construit vers 1700 par les architectes Bullet de Chamblain, père et fils, pour un financier. C’est un petit château de plaisance

De l’extérieur on voit un bâtiment à 2 niveaux avec trois avant-corps. Côté jardin, l’avant-corps est arrondi, avec une avancée vers l’extérieur et les jardins. Cela permet d’avoir beaucoup de lumière.

C’est sobre et élégant – de bon ton.

À l’intérieur des escaliers et des couloirs desservent toutes les pièces (qui ne sont donc pas uniquement en enfilade), ce qui est fonctionnel.  La disposition des pièces est conforme au goût du XVIIIe : classe et confort. Les domestiques sont logés sous les toits.

Il reste des boiseries et des décors peints d’origine. Ce sont les plus beaux, même si les boiseries du XIXe siècle du salon de musique sont bien aussi.

En 1895, le château est acheté par le banquier Louis Cahen d’Anvers. C’est la famille Cahen d’Anvers qui a décidé de reconstituer un mobilier XVIIIe siècle, tout en adaptant le lieu au mode de vie de la grande bourgeoisie. En effet, le goût dit rococo avec toutes ses fioritures a été violemment rejeté par la Révolution et l'Empire, mais a été redécouvert à partir de la 2nde moitié du XIXe. Le château que nous visitons est donc assez proche de celui qui existait vers 1930.


Le Salon chinois conserve ses boiseries dessinées par Bullet de Chamblain. Les chinoiseries sont peintes par Christophe Huet dans les années 1740. C'est une Chine d'opérette, un exotisme de pacotille, mais les dessins et les couleurs sont d'une délicatesse !

C'est une pièce d'angle avec 4 porte-fenêtres et 4 miroirs. La lumière est importante et joue dans le lustre.

Une idylle pastorale de chinoiserie qui est aussi loin de la Chine que des vraies bergères. Mais c'est rose, il y a des rubans, on taquine les filles et il y a de jolis oiseaux près des fenêtres.

Le mobilier est dans le même goût. Regardez-moi ce reposoir pour les verres, le brûle-parfum et les dragons de cette table d'appoint ! Un meuble réalisé dans un atelier parisien, mais avec des éléments flattant le goût d'ailleurs.


Les boiseries structurent l'espace en autant de petits tableaux. Il y a d'une scène à l'autre des jeux de symétrie et de différence. On peut passer beaucoup de temps à tout détailler (un héron aux ailes ouvertes, un héron aux ailes fermées par exemple).

Si vous aimez, vous pouvez également voir un décor de Huet à Chantilly.


Le boudoir à côté a un décor de même inspiration, mais dans un camaïeu bleu, toujours de la main de Huet. Ici les tableaux délimités sont plus grands et ce sont de grandes scènes qui se déploient. Ce jeu de bleu est assez intime, non ? Des paysages de rêve, des fenêtres sur un lointain.


Il y a aussi une pièce dite chambre d’honneur. C’est sans doute la marquise de Pompadour (qui a loué le château pendant quelques années) qui a fait réaliser ce très élégant décor en bois. Palmiers, colombes, paons, rinceaux un peu débordants, mais cette exubérance est contrebalancée par les grands vides et par la sobriété des couleurs. Des couleurs claires, des miroirs pour la lumière, des fauteuils près du feu.

La végétation sculptée se permet de légèrement déborder sur le plafond et sur les lignes verticales, en toute liberté, mais bien tenue quand même.

 

Y a un parc ! Avec un coin forestier, un coin potager, un coin parc à la française, un coin bosquet secret, des belles fontaines, tout ce qu'il faut.




Et comment y va-t-on ? Depuis Paris, on prend le RER A qui s’arrête à Noisy-Champs (à vérifier le dimanche) et on marche 30 minutes. Y a un bar sur le trajet pour prendre un café (du moins les années normales).

Merci à Moana pour m’avoir accompagnée, toujours aussi irremplaçable !


Dans les semaines à venir, nous parlerons de porcelaine, de ce que c’est que le rococo, de décor mural, de peinture tout court.

                                                



13 commentaires:

eimelle a dit…

visité il y a ... plus de 20 ans... j'ai l'impression qu'il a été bien remis en valeur !

nathalie a dit…

Il y a eu une grande campagne de rénovation à partir de 2006, suite à l'effondrement d'un plafond à cause de la mérule. Et il est très beau en effet !

keisha a dit…

Le nom Cahen d'Anvers me disait quelque chose , oui, des tableaux de Renoir?

Nathalie a dit…

Bien vu ! C’est une grande famille juive, apparentée aux malheureux Nissim de Camondo. D’ailleurs une des filles de Louis a été tuée pendant la guerre. Trois des filles de Louis ont été portraiturées par Renoir.

La chèvre grise a dit…

Et dire qu'il n'est pas si loin de chez moi et que je ne l'ai encore jamais visité...

miriam a dit…

Je le connais bien de l extérieur je passe devant lors de mes promenades en bord de Marne mais je ne l ai jamais visité. Tu me donnes des idées pour bientôt quand châteaux et musées vont ouvrir

nathalie a dit…

J'ai vécu des années à Paris et même sur le RER A sans y aller !

nathalie a dit…

Dans quelques jours ! Ceci dit, le parc est resté ouvert même quand le château était fermé.

Passage à l'Est! a dit…

Comme tu nous guides bien, à nouveau. Je visiterais bien ce château moi aussi, et si en plus c'est facilement accessible de Paris... Je rebondis aussi sur le nom Cahen d'Anvers, parce que je viens juste de lire un article de Julian Barnes sur deux livres récents (en anglais) sur les Camondo, les Cahen d'Anvers et autres familles proches, article illustré par un des portraits de Renoir. Je te mets le lien si ça t'intéresse: https://lrb.co.uk/the-paper/v43/n08/julian-barnes/mon-cher-monsieur

nathalie a dit…

Ah merci je lirai l'article demain !

nathalie a dit…

Ouah merci très intéressant cet article qui parvient à synthétiser plein de choses différentes, sur ces grandes familles, les collectionneurs, l'antisémitisme, etc. Le livre de De Waal sur les Ephrusi est traduit en français, il traite de Paris, de Vienne et du Japon, ce qui lui donne un ton très particulier et très touchant.
J'ai parlé de Warburg sur le blog l'année dernière, un autre exemple de trajectoire.

miriam a dit…

En ce moment il y a une très jolie exposition : D'Or et d'Orient de l'atelier ULGADOR : des paravents mais aussi d'autres objets décorés à la feuille métallique qui s'harmonise bien dans les décors XVIIIème du château

nathalie a dit…

Ce doit être élégant et raffiné !