Le blog est à Bath. Il s’est promené dans les rues, puis a visité les bains romains (et a bu un verre d’eau). Aujourd’hui, sans transition, le XVIIIe siècle et les Rooms ! Et plus exactement, les Assembly Rooms, une sorte d’établissement festif.
Les Assembly Rooms étaient autrefois désignés comme les Upper Rooms, en opposition aux Lower Rooms (mais les Lower ont été détruites par un incendie en 1820).
Le bâtiment a été construit par John Wood le jeune en 1771. On est dans le plus pur style georgien sobre et pompeux (plat et sans grand intérêt pour mon goût). Il est situé légèrement en hauteur (les Lower étaient au bord du fleuve), un peu à l’écart du centre historique, très près des nouveaux quartiers dont il sera question le week-end prochain.
Ces grandes pièces sont aujourd’hui vides, à l’exception notable des lustres dont plusieurs sont d’origine, ce qui les rend remarquables.
L'entrée principale |
Que faisait-on dans ce bâtiment ?
L’entrée était payante (tarif différencié pour les hommes, les femmes, mariées ou à marier). Les portes ouvraient à une heure précise – ce qui faisait que tout le monde arrivait en même temps et ce qui engendrait un encombrement de chaises à porteur.
Un beau couloir vous mène jusqu’à l’octogone, une sorte de vestibule desservant les trois pièces principales et où se tenait le maître de cérémonie (Mr King dans Northanger Abbey). Ces trois pièces étaient :
- · Une grande salle de bal
- · Une salle de jeu
- · Une salle de thé
À noter qu’une tribune fait le tour des trois salles en hauteur. Des musiciens y jouent des airs adaptés aux différentes activités. Ils peuvent ainsi se déplacer aisément d’une tribune à l’autre.
Photos de l'octogone (la photo de droite provient de Wikipedia).
Dans la salle de bal : on danse. On danse des menuets et autres danses codifiées. Il vous faut absolument un cavalier désigné pour danser. Si vous ne connaissez personne et cherchez à faire connaissance, vous ne dansez pas. Dans Northanger Abbey, la première fois que Catherine s’y rend, elle ne connaît personne et reste donc collée au mur à s’ennuyer. D’ailleurs, n’oubliez pas que les hommes choisissent leur cavalière et que les femmes peuvent seulement accepter ou refuser sous un prétexte poli, pas question pour elles de viser le grand maigre, là, qui leur plaît tant. C’est quand même le bon endroit pour faire du repérage et comparer sa robe avec celle des autres.
Dans la salle de jeu : il n’y a que les messieurs. Les messieurs jouent, mais sont supposés aussi entretenir leur réseau professionnel et amical, proposer et nouer des affaires, etc. On y joue une musique d’ambiance. Dans Northanger Abbey, c'est là où se rend Mr. Allen.
Dans la salle de thé : au moment où le thé est servi, tout le monde quitte en courant la salle de bal et fonce pour arriver en premier et réussir à être servi (cette scène est également très bien décrite dans Northanger Abbey). La collation est évidemment payante et là encore on a une petite musique d’ambiance. La salle était originellement meublée de tables et de sièges.
La saison de Bath était en hiver. Il faut donc imaginer que le bâtiment était chauffé, qu’il y avait plein de monde, tous en nage, en train de se bousculer, dans un boucan pas possible. Une certaine vision de l’enfer. On imagine bien qu’Austen n’était pas fan.
J’aime beaucoup cette occasion assez rare où la lecture d’un roman brillant permet de comprendre les usages d’un lieu, aujourd’hui totalement vide, et des pratiques de sociabilité disparues et où la visite d’un bâtiment permet de comprendre certains points sous-entendus dans le roman. Les deux s’éclairent mutuellement.
J’espère que vous avez apprécié ce reportage au plus près du terrain. La semaine prochaine, nous restons au XVIIIe siècle, mais il sera davantage question d’architecture.
Oh que oui j'apprécie ton billet! Surtout les échos entre roman et lieux réels. Tout une époque avant les réseaux et tout ça, mais codifiée quand même. Un coin quand même réservé aux gens chics, non?
RépondreSupprimerDe ce que j'ai compris les Low Rooms étaient plus largement fréquentés que les Upper, mais je ne sais pas si l'entrée était également payante. De toute façon, qui à la fin du XVIIIe siècle a les moyens d'avoir 3 heures de libre en journée, de s'habiller, de se chausser, avec gants et chapeau ? Pas uniquement les très riches, il y a aussi une bonne bourgeoisie urbaine ou rurale, mais il s'agit d'une fraction limitée de la population.
Supprimerj'adore les lustres!
RépondreSupprimerIls en sont très fiers. Non seulement les lustres sont d'époque, mais en plus ils ont été conçus pour ce bâtiment, donc c'est une vraie rareté de les avoir encore en place.
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