La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



samedi 14 décembre 2024

Honoré Daumier

 


Honoré Daumier (1808-1879) est né à Marseille (c’est un grand homme). 

Homme de presse, caricaturiste de talent, mais aussi peintre et sculpteur de génie !

Daumier œuvrait à une époque difficile. Six mois de prison pour avoir caricaturé Louis-Philippe en Gargantua. Ses caricatures sont abondamment présentes dans les livres d'histoire sur le XIXe siècle, mais aujourd'hui, place à la peinture !



Le wagon de troisième classe (1863 Ottawa). Un wagon où l'on voyage serré comme des sardines sur des planches de bois. Au premier plan, cette mère de famille bien fatiguée, avec son panier. On voit ses rides et ses cernes. Une jeune femme allaite, attirant le regard d'un homme à chapeau haut de forme. Comme les corps sont las ! Il en pèse sur leurs épaules.



Le Fardeau (1850-1860 Burrell Glasgow). Je crois que c'est l'une de ses premières peintures. Une femme courbée sous le poids de ce fardeau et son enfant, le long d'un quai de la Seine, face au vent. De mauvais vêtements qui n'abritent de rien du tout. Et l'habilité de la couleur avec ce trait brun noir sur le fond jaunâtre. Les silhouettes sont simplement et efficacement rendues.


L'homme à la corde (1858 Ottawa). Un ouvrier du bâtiment (ou un évadé ?) qui descend le long d'une corde dans un camaïeu de gris. Le traitement de cette peinture, grattée, râpée, floue, et pleine d'éclats est d'une modernité incroyable. C'est un chef d'oeuvre.


 
Bons confrères (vers 1860, pierre noire encre aquarelle, Burrell Glasgow). Daumier est le maître de la satyre des mœurs bourgeoises et le monde juridique y tient la première place. Juges et avocats sont d'accord contre le petit peuple, avec leurs silhouettes noires. Tandis qu'une femme est recroquevillée à l'arrière-plan, contre une colonne, la tête dans les mains, on se salue bien bas - entre confrères. Si les corps sont traités sobrement, les traits du visage sont ceux de la caricature. De fait, on est entre la gravure et la peinture.

 


Peintre dans son atelier feuilletant un carton à dessins (1855 Lyon). J'avoue un goût prononcé pour les peintures représentant des collections d'œuvres d'art. On peut supposer que Daumier se projetait aussi dans cette toile représentant l'artiste devant un grand tableau, à la recherche de ses modèles et des études, nécessaires à la conception de la peinture.  En tout cas, le geste et l'attitude sont très réussis.


Les amateurs d'estampes (Fondation Bemberg). Les trois têtes chenues dont le regard est rivé sur une feuille. Leur attention tendue n'est-elle pas merveilleusement rendue ? On aimerait bien voir aussi.


À gauche, L'Amateur d'estampes (vers 1860 Petit Palais). À droite, L'Amateur d'estampes (vers 1860 Burrell Glasgow).
Les deux toiles se répondent. Un collectionneur traîne dans une boutique d'estampes (un lieu que Daumier devait très bien connaître en tant que peintre et graveur). Bien habillé, le chapeau haut de forme, il regarde et parcourt les portefeuilles.
Celui de gauche a une belle lumière dorée, un peu brune, chaude, qui fait ressortir les traits d'une sanguine sur un dessin au mur. L'attitude est parfaitement rendue.
À droite, lumière grise et face à face entre l'homme et le dessin d'une femme, peut-être à l'encre. L'achètera-t-il ?


À gauche : Don Quichotte et Sancho Pancha (1870 Courtauld). À droite : Don Quichotte et Sancho Pancha (1864 Burrell Glasgow).

Daumier a représenté à de très nombreuses reprises le chevalier espagnol, héros de roman, héros méconnu, et son serviteur, duo un peu grotesque et un peu poétique.

À gauche des silhouettes indéfinissables, presque fantomatiques, inquiétantes en tout cas, mais d'une grande puissance d'évocation (et un trait d'une incroyable modernité).

À droite, une lumière qui vient du fond du tableau et qui éclaire en contre-jour la silhouette agile et dynamique du mince chevalier. Sancho nous tourne le dos au premier plan, pesant, presque endormi sur son âne. Ils vont vers la lumière.

 

J’ai déjà publié un billet au sujet de Daumier. J’avais alors montré plusieurs peintures représentant Don Quichotte et Sancho, ainsi que les très célèbres sculptures caricatures du personnel politique du XIXe siècle. Malheureusement, les sculptures de terre cuite ont été coulées en bronze seulement après sa mort. De même, ses peintures ont été connues et surtout appréciées après sa mort. Daumier est mort pauvre.



Don Quichotte et la mule morte (1867 Orsay). Cette oeuvre inachevée est incroyable, d'une sobriété tout à fait impressionnante. En quelques traits, tout semble posé.


La semaine prochaine... rien du tout. Reprise des billets monographiques en janvier.


 


8 commentaires:

  1. (oui j'ai été scotchée au rouget du billet précédent!)
    Bon, Daumier, merci de le présenter , franchement il st à (re)découvrir, un talent incroyable!
    OK, on va patienter.

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    1. Gros succès du rouget (il faut dire que cette peinture est incroyable, un talent !).
      Quant à Daumier... oui c'est un grand artiste.

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  2. A part L'Amateur d'estampes , c'est une œuvre plutôt sombre

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    1. En effet, même si les toiles du Quichotte peuvent avoir une lumière particulière.

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  3. je ne connaissais que ses caricatures, merci !

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    1. Les caricatures sont souvent reproduites dans les catalogues d'exposition et les livres d'histoire, c'est vrai.

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  4. je connaissais les gravures mais pas la peinture

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    1. Il y a eu une expo au Grand Palais il y a une petite vingtaine d'années pourtant, mais son oeuvre est dispersé.

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