Antoine Bourdelle (1861-1929) est un sculpteur français.
Il suit un premier apprentissage dans l’atelier d’ébénisterie de son père, puis des études à l’académie des beaux-arts de Toulouse et à Paris (atelier d’Antoine Falguière à l’école des Beaux-arts). Il a fait partie des praticiens de l’atelier de Rodin.
Comme tout sculpteur, il alterne les œuvres libres et les commandes (privées ou publiques) : décor du théâtre des Champs-Élysées, monuments commémoratifs, etc. Et comme plusieurs de ses modèles (en terre ou en plâtre) ont donné lieu à des sculptures en métal (en collaboration avec des ateliers de fondeurs) et bien forcément il y en a plusieurs exemplaires et on peut en trouver un peu partout (la sculpture est souvent un art du multiple).
Centaure et faunes à la syrinx (1916 encre, musée Bourdelle). Bourdelle réinvestit les figures de la mythologie, comme un moyen de ramener le rêve, la vie sauvage, la magie, l'héroïsme et l'enchantement divin dans le monde contemporain. Ici la puissance mystérieuse du centaure sur les faunes musiciens.
J'ai déjà parlé ici d'Aby Warburg, historien de l'art presque contemporain, et qui s'est intéressé aux centaures, mais dans l'art de la Renaissance italienne.


Centaure mourant (buste en plâtre, 1914, musée Bourdelle) et
Centaure mourant (plâtre, 1914, musée Bourdelle). Vous le connaissez peut-être ? Un exemplaire en métal se trouve dans le jardin du
musée Maurice Denis à Saint-Germain-en-Laye, un autre est à Montauban au musée Ingres). C'est une oeuvre emblématique. La tête couchée sur l'épaule, abandonnée. Le corps musclé, mais comme enserré en lui-même. Le visage stylisé (je pense
aux sculptures des Cyclades, très en vogue en ce début de siècle).
En 1897, grâce au soutien de Rodin, Bourdelle obtient la commande du
Monument aux combattants et défenseurs du Tarn-et-Garonne de 1870-1871, malgré un projet qui choque fortement. Le
monument se dresse toujours à Montauban.
Ici, la figure du
Guerrier allongé au glaive (étude, bronze, fonte Coubertin, 1900, musée Bourdelle). Figé dans la violence du geste, impressionnant avec ses doigts écartés et ses traits hurlants - bouche grande ouverte à
rebours des canons classiques. Il est conservé de très nombreuses études pour les différents éléments qui composent le monument, notamment cette série de têtes hurlantes :


Héraklès archer (bronze, musée Bourdelle). L'oeuvre date de 1909, mais connaît un tel succès que de nombreuses répliques suivront. Ce qui explique que l'oeuvre se trouve à la fois à Paris, à Rome, à Stockholm... C'est une commande privée.
Ce corps n'a rien de réaliste (malgré ou grâce à de nombreuses études d'après le modèle vivant), il y a trop de muscles, les membres sont trop grands, le corps masculin est subjugué au-delà de ses limites naturelles. Héraklès est un demi-dieu.
La sculpture allie la puissance et la force musculaire, la représentation d'un équilibre précaire avec ces appuis sur le pied et sur le genou, le déséquilibre imminent, l'instant suspendu - ne croirait-on pas voir la corde tendue ? Là encore le visage est stylisé, comme un kouros antique.
Deux bas-reliefs destinés au tout nouveau
Théâtre des Champs-Élysées (le lieu de l'Art déco) :
La Musique (1912, bronze, fonte Susse, musée Bourdelle) et
La Tragédie avec sacrificateur de face (1912, bronze, épreuve exécutée par Godard en 1969, musée Bourdelle).
Pour La Musique, une femme tient le violon tandis qu'un faune joue de la syrinx. Les deux ont des positions particulièrement instables. Le cadre du bas-relief est à la fois une contrainte et un support pour leurs corps. Pour La Tragédie, on pense au sacrifice d'Iphigénie ou à d'autres pièces du même type. Le corps de la femme est physiquement démembré, dans une attitude très... théâtrale. Le théâtre fut inaugurée en 1913 et c'est dans sa salle que fut donnée (quelques semaines après l'inauguration) la première du Sacre du printemps de Stravinsky - une musique sauvage.
L'alliance entre l'Art déco et l'antiquité grecque ne vous laisse pas indifférent ? Vous êtes mûr pour visiter la
fabuleuse Villa Kérylos.
En 1930 est inauguré le
Monument aux morts de la mine à Montceau-les-Mines dont Bourdelle a obtenu la commande quelques années plus tôt. La forme rappelle celle d'un phare, mais surtout celle de la lanterne des mineurs. Il s'orne de grands bas-reliefs en bas.
Projet pour le monument (1927, encre, musée Bourdelle).
Les mineurs dans la mine et Le retour du soldat, les deux pour les bas-reliefs du Monument de Montceau-les-Mines (1919, bronze, fonte Susse, musée Bourdelle). Les mineurs sont aussi musclés que le centaure. Ils sont représentés en pleine dignité et possession de leurs moyens, avec leurs outils et avec la lampe, emblème de la profession. Les femmes sont les pleureuses, les amies et les confidentes (je gage que la texture du panier a suscité beaucoup de plaisir chez notre sculpteur).
Évidemment, je ne peux que vous conseiller la visite de l’excellent musée Bourdelle à Paris, installé dans l’atelier que le sculpteur a occupé durant presque toute sa vie. Un endroit très agréable (il pleuvait quand j’y suis allée et j’ai peu profité du jardin, mais c'est bien quand même).
La semaine prochaine... dernier billet monographique.
La visite du musée bourdelle est prévue un jour un jour...
RépondreSupprimerComment ça, tu n'y a pas déjà été ? En plus ce n'est pas très loin de Montparnasse, aucune excuse !
SupprimerLes têtes hurlantes sont très impressionnantes
RépondreSupprimerOui, avec les muscles du visage exorbités.
Supprimerc'est un signe, j'ai prévu la visite du musée Bourdelle à mon prochain passage à Paris, tout près de la gare en effet!
RépondreSupprimerJ'espère que tu auras beau temps et que tu pourras profiter du jardin.
Supprimerle Musée Bourdelle est tout à fait charmant à l'ombre de la Tour Montparnasse
RépondreSupprimerhttps://netsdevoyages.car.blog/2017/06/03/jardin-musee-bourdelle-a-egreville/
RépondreSupprimerAutre musée Bourdelle, en Seine et marne
Je ne connaissais pas ce musée-jardin, cela a l'air très agréable comme endroit !
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