En 1553, le père Bernardo Torlioni, qui est le prêtre de l'église San Sebastiano, fait venir de Vérone un jeune peintre prometteur et qui commence à avoir une certaine renommée : celui que l'on connaît sous le nom de Véronèse, dont on ignore le nom exact, puisque Paolo Caliari est sans doute un nom d'emprunt.
Nous avons ici la chance d'avoir un programme complet de l'artiste :
1555 : plafond de la sacristie
1556 : plafond de la nef : plusieurs panneaux insérés dans un cadre en stuc. L'histoire d'Esther.
1558 : la vie de Saint Sébastien sur les murs
1559-61 : les volets de l'orgue et le panneau de l'autel
1565 : trois peintures pour le choeur
C'est une église à l'architecture classique très claire. Un édifice gai et lumineux, animé par cette peinture élégante et colorée et par les alternances de stuc ou de pierre blanche et de dorures. Le choeur s'ouvre par un arc triomphal.
La nef est couverte par un plafond à caissons dans lequel les peintures de Véronèse prennent place. Trois toiles campent l'histoire d'Esther. Du sol on distingue très bien les beaux chevaux et l'étendard rose-rouge.
Ça, c'est une chapelle latérale avec une Crucifixion de Véronèse. Je suis impressionnée par la façon très réussie dont la peinture s'insère dans l'architecture, notamment grâce aux éléments sculptés et à l'usage de la lumière.
Que serait la peinture de Véronèse sans... les chiens ?
Ici, un détail d'une des grandes toiles du choeur.
Véronèse est enterré à San Sebastiano et un petit monument lui rend hommage.
Véronèse a réalisé de très nombreuses œuvres pour les couvents et églises de Venise, mais également pour le palais des Doges.
Il est connu pour ses grandes représentations de repas avec Jésus - je vous rappelle ce mémorable billet iconographique intitulé "À table avec Jésus". Le Musée du Louvre à Paris conserve les très célèbres Noces de Cana, destinées au couvent de San Giorgio Maggiore, tableau volé par les armées napoléoniennes, et qui est exposé dans des conditions absolument indignes - franchement, si on ne peut pas voir le tableau à Paris, on ferait mieux de le rendre !
Les galeries de l'Accademia exposent fort heureusement ce... ce qui devait être une immense Cène destinée au couvent Santi Giovanni e Paolo. Toutefois, l'Inquisition étant montée sur ses grands chevaux devant le cortège abracadabrant qui accompagne Jésus, Véronèse le rebaptisa Le Repas chez Lévi. Il faut dire que le traitement n'est guère conventuel. Nous n'en finirions pas de détailler la composition, même si celle-ci est remarquablement posée et équilibrée au vu de tout ce qui se passe. Les trois grandes arcades, les deux escaliers symétriques, l'architecture lointaine et le vide central, tout cela est très pensé.
Et au centre de l'image, il y ce chien qui montre... son entrepatte et qui se détourne du spectateur pour regarder un chat qui a réussi à grappiller à manger.
Ah non, pardon, le centre de la scène - de la Cène - c'est bien Jésus en train de parler à Jean. Mais personne ne semble prêter attention à leur conversation. Et ce magnifique prélat vêtu de rouge a l'attention distraite par le chien.
C'est du grand art.
La pinacothèque du Palais Royal de Turin conserve également plusieurs toiles de Véronèse, ne les manquez pas.
Les semaines précédentes : le départ pour Venise : balade le long des canaux ; Vittore Carpaccio à la Scuola Dalmata degli Schiavoni ; Titien à l'église des Frari
La semaine prochaine, un autre édifice, un autre peintre.
Je note ton coup de gueule : qu'en est-il de cette oeuvre au Louvre?
RépondreSupprimerOui je suis allée au Louvre en décembre et franchement ce que l'on fait à la peinture vénitienne est scandaleux.
SupprimerLes plafonds à caissons me font toujours un peu penser à des bandes dessinées
RépondreSupprimerEt ce n'est pas totalement faux.
Supprimerj'adore ces petits détails avec les animaux!
RépondreSupprimerAlors tu es servie avec Véronèse.
SupprimerFranchement d'accord avec ton coup de gueule sur le Louvre. Mais les réamenagements du musée, en éloignant la Joconde, et la foule qui l'accompagne, de la salle où se trouve Véronèse, et d'autres très grands chef-d’oeuvre dont la foule semble se désintéresser complètement devrait permettre enfin de rendre la contemplation plus paisible.
RépondreSupprimerL'église de Venise dont tu parles à été l'un de mes coups de cœurs lors de mon premier séjour à Venise (je parle d'il y a pile 30 ans). A l'époque, les horaires de visites étaient très limitées- et l'église deserte. J'y suis retourné l'an dernier avec toujours autant de plaisir.
Oui les annonces du Louvre sont positives, attendons la réalisation.
SupprimerLà j'ai trouvé que les églises étaient largement ouvertes, avec peu de monde dedans.