Kobayashi Takiji, Le
Bateau-usine, traduit du japonais par
Evelyne Lesigne-Audoly, 1e éd. 1929, Paris, Éditions Yago, 2010.
Le roman raconte une campagne sur
un bateau-usine japonais, pêchant et mettant en boîte le crabe, dans les mers
du Nord, entre Japon et Russie – on est dans les années 30, en pleine
confrontation d’avant-guerre. L’auteur ne décrit pas vraiment les techniques ou
l’organisation du travail mais dénonce l’esclavage dans lequel sont tenus les
ouvriers. L’embauche (ou plutôt le rabattage) est décrite, puis leurs
conditions d’existence misérables. La promiscuité, la saleté, le froid, les
tempêtes, les maladies, la violence des sévices endurés, tout cela est décrit
avec un grand réalisme et tout est documenté. Étonnamment, pour un roman à
thèse, c’est extrêmement prenant. En s’arrêtant tour à tour sur chacun des
personnages, Kobayashi explique les mécanismes de l’exploitation : les
paysans pauvres expulsés de leurs propres terres, qui vont grossir les villes,
les usines, les mines, la fortune colossale des armateurs qui possèdent les
bateaux (les conserves de poisson sont un produit d’exportation réputé),
l’armée qui protège les intérêts économiques, les différences sociales entre
Tokyo et les îles plus éloignées.
Le roman reste pourtant très
humain, malgré sa dureté et sa noirceur. Les marins, pêcheurs et ouvriers sont
décrits comme un collectif, il n’y a pas de héros individuel. Ce qui intéresse
l’auteur est la façon dont les pauvres réagissent peu à peu face à leurs
conditions. C’est un roman sur le travail très prenant, à la langue sobre.
Dans la mer d’Okhotsk, la couleur
de la mer se changea brusquement en gris. Le froid piquant transperçait les
vêtements des ouvriers, dont les lèvres étaient violettes. Plus l’air devenait
froid, plus soufflait en bourrasque une neige fine, sèche comme du sel. Les
hommes au travail sur le pont devaient se recroqueviller à plat ventre pour
éviter les attaques des flocons qui venaient se planter dans les mains et les
visages comme autant de minuscules éclats de verre.
Tu m'en voudras pas trop si je passe ;) !
RépondreSupprimerAh ce n'est pas joyeux comme histoire, ce n'est pas facile mais passionnant. Je t'en veux pas quand même...
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