Paweł
Goźliński, Jul, traduit du polonais
par Isabelle Jannès-Kalinowski, parution originale 2010, paru en France aux
éditions Noir sur Blanc.
Un
gros roman étrange et très noir, très glauque.
Nous
sommes à Paris, à l’été 1845, au milieu des réfugiés polonais. C’est une
atmosphère d’hommes perdus loin de chez eux, complotant, dérivant, en proie au
jeu et à l’alcool, à la désespérance. Il y a des poètes, des prophètes, des
courants sectaires, des espions à la solde de la Russie ou de la police. Il y a
surtout ces meurtres : un homme aux mains tranchées brûlant vif, un couple
précipité dans le vide, des écritures de sang… des meurtres barbares, l’œuvre
d’un fou.
Un meurtrier qui se fait un feu d’artifice sur un cadavre, c’est bon pour un roman feuilleton. Mais ici, on est à Paris, sous Louis-Philippe. Tu saisis ? Ici, on fait de l’argent, et la mort on la cache dans des maisons bien tenues comme celle-ci. À quoi bon déblatérer sur la mort ? La mort, ça ne rapporte pas !
C’est
un roman policier qui tient du thriller et du roman noir. Alcool, boue, sueur,
excrément, complots, tortures physiques et mentales… Le délire complotiste des
réfugiés polonais et la misère répugnante de Paris… C’est l’envers du Paris
lumineux ou grandiloquent, on est dans la veine d’Eugène Sue, dans le gluant.
Deux imaginaires semblent s’opposer : celui du Paris de la Révolution de
Juillet avec son roi bourgeois et ses élites molles et sans grandeur et celui
du romantisme polonais, révolutionnaire et héroïque. Les personnages naviguent
entre les deux, ne réussissant réellement à aucun.
Paris. les berges de la Seine avec la silhouette du Panthéon
daguerréotype de P.-M. Hossard Paul Michel,
1843, musée d'Orsay, image RMN
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Il rit au visage de Podhorecki, et de sa bouche s’exhale l’odeur fétide d’un combat perpétuel entre ses sucs gastriques et la bouteille de cognac.
C’est
très réussi. À tel point que j’ai ressenti une vraie répugnance à plusieurs
moments de ma lecture ! Un comble. J’aurais aimé que quelques lueurs
d’espoirs soient laissées à cette pauvre humanité. L’intrigue criminelle est
plutôt réussie, il y a un vrai suspense.
Le
seul réel bémol dans ce livre est que son auteur connaît trop bien son sujet et
que le lecteur, lui, est perdu. La culture polonaise est importante : les
étapes de la lutte contre la Russie, de l’asile donné par la France, les
schismes religieux, la poésie… Il faut accepter d’être un peu perdu à diverses
reprises, et c’est un peu énervant.
Une
lecture prenante.
Gruszczyński
se gratte derrière l’oreille comme s’il voulait se creuser le ciboulot et en
extraire un savoir secret. Mais soit ce savoir s’est épuisé, soit il ne s’est
jamais trouvé là, car on n’entend dans le salon que le crissement du doigt
parmi les pellicules.
Celui là je le note, d'abord parce que l'éditeur ne sort rien de mièvre et que tous ses livres sont bons
RépondreSupprimerD'accord avec toi il est parfois difficile dans ce genre de bouquin de tout comprendre quand on connait peu la culture du pays mais à force de lire sur les pays d'Europe centrale ça vient et je me sens maintenant plus à l'aise
je suis en train de lire un polar polonais justement et je me régale
Il a l'air très noir. Mais même si je ne connais rien (ou pas grand chose) de l'histoire de la Pologne, pourquoi pas.
RépondreSupprimerJe serai curieuse de connaître vos avis, ce n'est pas un livre ordinaire.
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