Francis Scott Fitzgerald, Tendre est la nuit, traduit de
l’américain par Jacques Tournier, 1934.
Un bon gros roman qui nous plonge
dans les affres de quelques riches américains vivant en Europe.
Au début, nous suivons Rosemary,
jeune actrice de 17 ans, et sa mère sur la plage, pas très loin de Cannes. Elle
rencontre un couple, Nicole et Dick, et tombe amoureuse de ce dernier. Sa mère
estime que c’est une bonne chose – pour lui apprendre la vie. Après quelques
semaines de fêtes parisiennes, le récit s’attache dorénavant à Dick et à
l’histoire qui le lie à Nicole. Il est psychiatre, elle a été sa malade, elle
est immensément riche, pas lui. Il est le mari et le médecin, mais il est plus
fragile qu’il ne le croit.
C’est un roman très riche, en
partie parce que le récit effectue des allers et retours entre les personnages.
Il ne s’agit pas d’un roman choral, mais d’un changement de point de vue, qui
trouble la perception du lecteur. Dick est-il réellement si brillant ?
Rosemary passionnément amoureuse ou froide ? La narration se déroulant sur
plusieurs années, le roman délivre quelques flashs sur des moments bien
différents.
On reconnaît dans ce roman
plusieurs inspirations autobiographiques, mais il est difficile de se
prononcer. La maladie mentale de Nicole et son séjour dans diverses cliniques
suisses est peut-être un écho de la schizophrénie de Zelda, mais les dernières
pages du livre lui rendent toute sa liberté et sa beauté. Nicole sort de la
maladie et du couple qu’elle formait avec Dick, pour établir une autre
relation, devenir autonome, ne plus être l’ombre d’un mari. On ne peut
s’empêcher de penser que Fitzgerald laisse ainsi la porte ouverte à la
guérison. Et si Dick, le si solaire, si charmant, si merveilleux, est un
autoportrait idéalisé et agaçant de l’auteur, la peinture de sa déchéance à
cause de l’alcool est tout ce qu’il y a de plus lucide.
La conscience de Dick s’était en grande partie formée grâce aux images clinquantes de son enfance. Il était pourtant parvenu, à travers ce faux luxe et cet éclat trompeur, à alimenter le brasier douloureux et secret de son intelligence.
Une mention pour la mère de Rosemary,
à l’esprit pratique bien rodé.
Velasco, Adam et Ève, 1932, Madrid Reina Sofia, M&M |
Le roman dresse aussi le portrait
d’une certaine classe sociale, ces très riches, notamment américains, venus
soigner leur alcoolisme, ennui, dépression et même homosexualité, considérée
comme une maladie, en Suisse, sur la Riviera, à Rome, à Paris, dans le
champagne et les alcools, avec quelques altercations avec les forces de police
locales. Ce sont des populations hors sol, vaines – et je me mélange entre tous
ces gens.
De ce livre se dégage un double
sentiment de solitude et de mélancolie.
Elle marchait comme une danseuse,
en reposant à peine sur les hanches et en cambrant légèrement les reins. La lumière
était si violente qu’elle crut se heurter à son ombre, et recula – elle était
éblouie. À cinquante mètres en contrebas, la Méditerranée perdait par instants
ses couleurs devant les assauts d’un soleil implacable.
UN écrivain qu'il faudrait que je relise.
RépondreSupprimerJe pense en effet que je relirai certains de ses romans plus tard.
SupprimerJ'avais beaucoup aimé ce roman, il est rare de lire sur une telle vision du couple :)
RépondreSupprimerOui c'est vrai.
SupprimerJ'ai du mal avec cet écrivain à cause des milieux qu'il dépeint et qui ne m'intéresse pas voir qui m'irrite!
RépondreSupprimerAh je comprends tout à fait cette réaction. Cet univers est imbuvable (et pourtant ça picole).
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