La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



jeudi 15 octobre 2015

La politique, monologue Francoquin, c’est quand il y a cinquante bourriques et une seule carotte.

Yak Rivais, Aventures du général Francoquin au pays des frères Cyclopus, première publication 1967, réédité au Tripode en 2015.

De la littérature ! (et un bon gros roman irracontable)

À une époque non déterminée, mais qui sent sa fin de XIXe siècle, un pays sans nom a vu la révolution des frères Cyclopus triompher. Mais le pays est ruiné et est en partie aux mains du puissant Empereur voisin qui envoie le général dom Franquin gouverner (= faire le gouverneur fantoche). C’est la première semaine de ce général que nous suivons.

Francoquin sonne le rassemblement au sommet de la colline, c’est-à-dire qu’il donne de la voix comme un putois pris au piège.

Franquin est accompagné de sa femme (et de l’amant de celui-ci), de sa fille Chou-Baby, de sa maîtresse Filasse, de son tueur N’a-qu’un-Œil et d’une drôle d’équipe. Il rencontre sur sa route des bandits, des Indiens, des espions à la solde de ci ou l’autre. Mais Franquin – Francoquin – ne se révèle ni si sot ni si bon à rien qu’il en a l’air…
Cette lecture m’a énormément plu. L’histoire est complexe (je me suis souvent perdue entre les différents tueurs et chefs révolutionnaires) et alterne les points de vue. C’est un grand roman d’aventures, ressemblant volontiers à un western, à une fable politique sur la construction d’un pays, à une grosse blague et à un hymne à l’amitié et à l’amour triomphant.


L’humour est essentiel. Les personnages sont dotés de surnoms qui sont autant de clins d’œil. Les révolutionnaires se divisent entre anarchistes, utopistes et purs comme autant de stéréotypes. Le Jésuite est imbuvable. Les hommes ne pensent bien souvent qu’aux filles (même si cela leur attire des ennuis) et à se battre. Le ton alterne entre blagues de mauvais goût, jeux de mots plus ou moins fins et allusions érudites et favorise les dialogues et les phrases sans verbe, avec beaucoup d’efficacité. Le roman rend également les défauts de prononciations des uns et des autres (entre l’un qui avale les R et l’autre qui zozote…). Un personnage emploie un mot pour l’autre (quenelles pour querelle, imbacille pour imbécile, biscotos pour bisceps) et c’est très drôle. On est à haute voix. Mais l’auteur ne cède jamais à la facilité et certaines conversations peuvent se tenir entièrement au passé simple.

C’est un livre savant et drôle à la fois, plein de poésie et de joie.

- Tu fais semblant de partir avec nous, mais tu surveilles les parages. Si un curieux s’avise de nous filer, tu t’en charges.
-       Je décharge, corrige atrocement Labosse.

Merci Estelle pour le prêt du livre (je vais peut-être me l’acheter). L'avis de Lou Dev.

6 commentaires:

keisha a dit…

Oh mais c'est tout à fait original! Je ne connaissais pas du tout...Même si ma bibli possède plein de ses livres!

nathalie a dit…

Pour moi aussi c'est une (brillante) découverte.

Estelle a dit…

Et merci à Aline qui m'a offert ce livre (je ne connaissais pas du tout Yak Rivais !).

Anna a dit…

J'aime beaucoup les enfantastiques et les autres livres de Rivais pour la jeunesse, j'ai très envie de lire celui-là !

nathalie a dit…

Vive Aline !

nathalie a dit…

S'il y a la même inventivité verbale, en effet.