Victor Hugo, Mille francs de
récompense, 1866.
Une petite pièce bien sympathique.
La première scène s'ouvre sur un drame de la pauvreté : les meubles
sont en passe d'être saisis chez Cyprienne et sa mère. En quelques moments,
nous apprenons tout : un grand-père ruiné, un père disparu, un riche désireux
de s'emparer de la fille, un fiancé. Mais aussi un voleur sorti de nulle part
qui va jouer le rôle de la Providence.
Encore une métaphore qui fait le trottoir depuis longtemps.
C'est une pièce très agréable en partie grâce à ce voleur qui donne
le ton et l'ambiance : un air de liberté, de fantaisie, une assurance que tout
finira bien. Bien sûr le lecteur pense à Jean Valjean, mais il convient de
noter que plusieurs pièces de Hugo possèdent un personnage symbole de liberté
qui s'insère entre les héros et un pouvoir qui veut les asservir, en l’occurrence
les puissances d'argent. Sur ce plan, la pièce rappelle Mangeront-ils ? et son fou pas si fou. Le voleur joue ici le rôle
du rouage, de la Providence, du deus ex
machina au grand cœur.
T. Couture, Mme de Brunecke, vers 1870, Bordeaux musée des beaux-arts, M&M. |
Le point de départ m'a fait penser aux romans de Balzac, avec ces
origines secrètes, ce retournement de fortune, le rôle trouble joué par un
huissier et un banquier. L'action se déroule en effet plutôt dans les années
1830, mais contient un hommage vibrant aux années révolutionnaires et à la
liberté. En 80 pages, soit une petite heure, Hugo fait
tenir un nombre impressionnant de rebondissements et de quiproquos qui font
tout le charme de la pièce. Ici le juge et le voleur choisissent de jouer leur voix personnelle, plutôt que l'air qui est attendu d'eux par la société. Nous passons du drame au Carnaval, du suicide aux
retrouvailles – la bonté et la cruauté sont au coin de la rue.
- Du reste, rien d'illicite. Notre probité demeure intacte. La stricte
observation des lois est le devoir du bon citoyen.
- Comme cela fera bien au
Père-Lachaise, l'épitaphe de cet homme-là!
tu as tout Zola à lire!
RépondreSupprimerÀ lire ou à relire, mais ça n'a pas vraiment de rapport à mon sens. Cette pièce est héritière du romantisme.
Supprimerpour changer de balzac. c'était une plaisanterie.
RépondreSupprimerVi, vi, mais ce qui n'est pas une blague, c'est que je (re)lis mes auteurs chacun leur tour. Donc Émile doit attendre encore quelques années.
SupprimerComme tu fais bien de mettre en valeur cette citation :
RépondreSupprimer"Du reste, rien d'illicite. Notre probité demeure intacte. La stricte observation des lois est le devoir du bon citoyen."
On dirait que tu as pioché dans l'actualité pour lancer le débat entre ce qui est légal et ce qui est moral !
On dirait du Balzac pour le côté un peu feuilleton, les rebondissements, les retrouvailles du père et de la fille, le suicide manqué de l'amoureux etc..
Une pièce sympathique mais un peu plus que cela car elle contient toutes les idées marquantes de V.H sur la liberté et la justice, la légalité et la morale, sur la défense du peuple et l'importance de l'éducation pour lutter contre la misère et donc la délinquance. Et puis ce magnifique texte sur la Marseillaise !
Oui, le passage sur la Marseillaise est magnifique ! Pas assez connu, clairement. Et en effet, j'aime bien les apportés vachardes de notre voleur au grand coeur.
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